[dropcap]L[/dropcap]e rappeur Master G avait prédit que le collectif mis en place pour revendiquer les droits des artistes n’ira pas loin. ‘’La propagande et la manipulation sont devenues les seuls moyens pour parvenir à des fins obscurs’’. Plus d’une semaine après la publication de ces propos sur Facebook, l’histoire semble lui avoir donné raison. Les revendications des artistes, parmi lesquels figurent Elie Kamano et Takana Zion, viennent de s’écrouler comme un château de cartes après une rencontre avec le président Alpha Condé

Que du temps perdu. Que des paroles en l’air. Ceux-là même qui réclamaient la libération de Malick Kébé et Ablaye Mbaye ont lamentablement échoué. Les membres du collectif pour la revendication des droits des artistes se regardent en chiens de faïences. Ils ont vidé leur bile dans une émission spéciale de près de 3h, rien que pour eux sur radio Espace. Une attitude qui n’honore guère les acteurs du monde culturel, déjà en lambeau.

Du collectif au clivage

Une vingtaine d’artistes s’invitent dans les Grandes Gueules, il y a à peine deux semaines. Ils lancent en tintamarre un collectif pour demander la libération de Malick Kébé et Ablaye Mbaye, détenus dans le cadre de l’enquête sur le drame de Rogbane. Ils menacent même de marcher dans les rues si leurs revendications n’étaient pas satisfaites. Leur manifestation en perspectives est avortée à la dernière minute pour des raisons encore obscures. Tous étaient unis pour la même jusqu’à ce qu’ils partent rencontrer le gouverneur de la ville de Conakry et le Alpha Condé.

‘’Nous sommes partis à la base pour dénoncer l’injustice faite contre Malick Kébé et Ablaye Mbaye. Takana m’a appelé pour se joindre au combat. On a discuté. Il a fait des propositions. Il nous fallait un bureau qui allait gérer les choses. Instinct Killers et Banlieuzarts m’ont désigné comme porte-parole du collectif. A mon fort étonnement, j’ai vu les Bénédi venir dans le collectif alors que je n’ai fait appel à personne. C’est une structure d’artistes, non pas de managers. J’ai dit aux gens que ça ne va pas aller loin. Ils vont diviser les artistes’’, avait prévenu Elie Kamano.

‘’On a appelé des artistes manipulables pour aller chez le gouverneur. C’est à la dernière minute que j’ai été informé au Musée national. Ils m’ont présenté deux millions comme transport donné par Soriba Sorel’’, a raconté le reggaeman, furax dans les Grandes Gueules.  ‘’Le gouverneur est l’une de nos cibles. On ne réclamait pas coûte-que-coûte la libération de Malick Kébé et Ablaye Mbaye. Dans nos revendications, on supposait que le gouverneur et le maire (de Ratoma)  devraient les rejoindre en prison. Partir chez le gouverneur est donc une trahison’’, a indiqué Elie Kamano qui se définit comme un artiste qui se bat pour la culture.

Bénédi, confusionniste ?

Dans cette histoire de trahison, Elie y voit la main de Mohamed Ibn Abdallah Oularé, le patron de Bénédi records. Ce dernier se défend et affirme avoir été parmi les premières personnes à militer pour la libération de Malick  Kébé et Ablaye Mbaye. ‘’Tous les opérateurs, managers et artistes passaient la journée à la gendarmerie après l’arrestation de Malick Kébé. Je me suis dit que si Elie est le porte-parole du collectif pour leur libération, ça n’ira nulle part’’, a avancé Bénédi. Evoquant les raisons, ‘’Elie a des problèmes, il est actuellement au niveau du tribunal. Il peut aller déconner devant le président et ça sera un autre problème pour tout le collectif. Il ne peut pas insulter le président et aller devant lui pour revendiquer quelque chose’’, a estimé l’opérateur culturel, producteur et manager d’artistes.

Pour Bénédi, ‘’Elie se bat contre lui-même, il a des problèmes avec tout le monde. Même avec la France. Il faut qu’il change de stratégies’’, a conseillé le producteur.

La colère du chanteur Aboubacar 2 Diaby

De retour au pays il y a quelques mois, 2 Diaby peine à avoir un visa pour retourner en France où il vivait depuis plus 10 ans. Il s’est illustré comme meneur des mouvements de revendications pour la libération de Malick Kébé dont il espère une faveur à sa sortie de prison.  Non inscrit sur la liste officielle d’artistes devant rencontrer Alpha Condé le weekend dernier, le chanteur s’est vu refuser l’accès au salon VIP du chef de l’Etat. Motif évoqué : ‘’son accoutrement ressemble à celui d’un gangster’’. ‘’On m’a dit que j’étais habillé comme un thug. Dimanche au Jardin du 2 octobre lors d’une rencontre, il nous a été rapporté que le président n’allait recevoir que deux artistes. Pas plus. Takana nous a trahis. Lorsque je l’ai trouvé au Gouvernorat, j’ai commencé à douter’’, fulmine Aboubacar 2 Diaby. Et comme l’argent est le nerf de la guerre, le chanteur dénonce l’attitude de la délégation d’artistes reçus par Alpha Condé. ‘’J’ai attendu dehors jusqu’à 16h. Ils sont sortis avec de petits sacs. Plus tard, l’un d’entre eux m’a raconté qu’ils ont reçus chacun 10 millions de francs guinéens’’.

A l’allure où vont les choses, il est fort probable que la lutte du collectif d’artistes, entreprise ces dernières semaines, est vouée à l’échec. Les seuls perdants dans tout ça : Malick Kébé et Ablaye Mbaye qui croupissent en prison. En attendant bien sûr que la justice les situe sur leur sort.

 Ciré BALDE, pour VisionGuinee.Info

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