Après sa retraite de Kindia à 145 km de Conakry, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) est à la phase de restitution. C’est l’objet de sa rencontre avec les journalistes, le samedi 1er mars 2014 afin de faire «Le point sur l’évaluation et la capitalisation des élections législatives 2013».
A la rencontre de Kindia, on s’en souvient, le Président de l’Institution chargée de l’organisation des élections avait, dès l’entame des travaux, averti : «L’heure n’est pas aux congratulations. Même si, aujourd’hui, l’Assemblée nationale, pilier fondamental de la République, est en place, de nombreux écueils ont émaillé le parcours de la CENI. Il faut, à présent, les évaluer et les relever».
C’est donc pour partager les résultats des travaux de la semaine de travail passée dans la “Ville des agrumes”, marquée par deux jours de conclave des membres de la CENI suivis de l’atelier d’évaluation du processus électoral passé, que les Commissaires se sont présentés devant les journalistes à la Maison de la Presse.
Et dès l’entame de leurs interventions, les Commissaires de la CENI ont laissé transparaitre une évidence : la non-tenue des élections locales pour ce premier trimestre 2014, tel que stipulé par l’Accord politique du 3 juillet 2013.
Le Commissaire Jacques Gbonimy d’avancer: «L’Accord du 3 Juillet est clair : c’est au premier trimestre de cette année. Mais vu l’état actuel des préparatifs, je crois qu’on ne peut pas les tenir. Nous sommes en mars et c’est le dernier mois du premier trimestre de 2014».
Les conclusions de l’atelier de Kindia devront être adjointes des recommandations des différentes missions d’observation électorales en vue de la production d’un document qui devrait servir de Guide pour l’organisation des prochaines élections communales et communautaires.
En prenant la parole, les Commissaires ont insisté sur la fixation de date des élections Communales et Communautaires. Pas question, pour eux de fixer une quelconque date et ne pas pouvoir la respecter. Le défi, pour eux, c’est l’organisation d’élections dont les résultats seront acceptés par toutes les parties prenantes.
Selon le Directeur de la Planification de la CENI, il est certes vrai que «La CENI est l’organe de gestion des élections» mais, précise Pathé Dieng, «Il y a des acteurs et des parties prenantes sans lesquels on ne peut pas atteindre les objectifs assignés à la CENI». Pour lui, «Les responsabilités des différents groupes d’acteurs et parties prenantes à la gouvernance électorale de la CENI peuvent impacter le bon déroulement du processus électoral et même le fonctionnement interne de l’Institution».
Soutenant que «Tous les acteurs impliqués dans le processus prendront fait et cause pour le plan d’action pour la date et pour le cheminement normal des opérations», Pathé Dieng est tout confiant: «On ne tapera plus sur la CENI en disant qu’elle n’est pas capable de respecter une date».
Il a d’ailleurs balayé du revers de la main toute responsabilité de la CENI dans l’établissement du fameux «chronogramme de 84 jours des législatives» de 2013. Pathé Dieng dira que «La CENI a eu à le prendre pour fait et cause» avant d’indexer : «C’était une imposition de la classe politique et des partenaires techniques et financiers».
Le Directeur de la Formation fera un rappel: «Nous nous sommes retrouvés à Kindia pour deux objectifs : faire l’auto-évaluation des Commissaires et l’évaluation des législatives et l’élaboration d’une perspective pour les communales de 2014 et la présidentielle de 2015».
Pour Jacques Gbonimy, «Tout ce que nous faisons, c’est dans l’optique du chronogramme. Mais, nous le ferons avec tous les acteurs concernés. Nous avons jeté les jalons d’un chronogramme. On a un plan d’action».
Il va situer la cause du retard donc, de la non-tenue de la période indiquée par l’Accord du 3 juillet 2013, ailleurs: «On ne peut pas vous dire où ? Mais, retenez que l’Assemblée [nationale] a été élue et tardivement, elle a été installée. Aujourd’hui, la CENI est en train de se battre, elle n’est pas en possession de tous les moyens nécessaires pour organiser les élections. Nous faisons avec les moyens que nous avons pour éviter assez de retard».
Parlant du budget électoral, Jacques Gbonimy se prononce. «Nous avons un budget mais, c’est un projet de budget jusqu’à maintenant, qui est en discussion avec les Finances. On ne peut pas vous dire exactement à ce jour à combien s’élève ce budget. C’est un projet de budget qui est en discussion au Ministère de l’Economie et des Finances».
Yaya Kane, le Directeur des Opérations, semble plutôt amer. Il avance un exemple: «Quand, à dix jours de la formation de soixante mille (60 000) agents de bureaux de vote, vous n’avez pas le financement parce qu’on tergiverse sur la question des conventions, vous ne pouvez pas réussir cette formation». Ce Commissaire se veut d’ailleurs prudent par rapport aux réalités: «Nous ne vous donnerons aucune date tant que tous ces acteurs réunis dans la même salle n’auront pas dit qu’on va voter à telle date». Il veut certainement éviter que l’on ait à donner une multitude de dates: «Si on ne vous ne donne pas de date», c’est pour éviter ce que l’on a connu dans un passé encore récent. Pour lui, «On pourrait donner une date comme par le passé, mais si c’est pour la changer, non». Yaya Kane va marteler : «La date, ce n’est pas fétiche, l’important est que les résultats soient acceptés de tous».
Par rapport aux griefs portés contre la CENI suite aux dernières élections législatives, Yaya Kane dira que «Les imperfections constatées lors de ce scrutin n’incombent pas à la CENI toute seule». Il estime que : «Nous aurions pu produire des résultats dans le délai imparti par la loi en trois jours mais, c’est par ce que la confiance n’était pas assise». A la question de savoir «Que faut-il pour que la confiance renaisse ?» Yaya Kane conseille le vote électronique ou de l’introduction de l’électronique: «Pour des résultats acceptés de tous, l’instauration de l’électronique s’avère nécessaire». Surtout que le Président de l’UFDG et député à l’Assemblée nationale, Cellou Dalein Diallo avait récemment menacé, au cas où les conditions d’une transparence des élections communales et communautaires n’étaient pas établies: «Nous serons obligés de rependre les manifestations de rue».
Déjà, les mêmes menaces étaient proférées par le leader de l’UFR et député à l’Assemblée nationale, Sidya Touré, à la veille des élections législatives dernières: «Si les choses continuent de la sorte, l’opposition va se retrouver et appeler à des meetings et marches pacifiques».
D’autre part, les Commissaires de la CENI ont abordé le cas de l’opérateur tant décrié par la classe politique de l’opposition, Waymark. Selon eux: «Le départ ou le maintien de cet opérateur ne dépend pas de nous, mais plutôt de tous les acteurs concernés par le processus électoral».
Les Commissaires ont rassuré de l’établissement d’une «Cartographie électorale» exempte d’anomalies qui pourraient porter préjudices aux élections annoncées dans le pays.
Le Président de la CENI se veut aussi rassurant. Bakary Fofana l’a signifié à la clôture des travaux de la rencontre de Kindia: «Nos acquis sont nombreux et de qualité. Il nous appartient désormais de traduire en actes concrets et novateurs l’ensemble de ces recommandations qui concourent à l’enracinement de la démocratie et de l’Etat de droit dans notre pays à travers l’organisation d’élections transparentes, justes et acceptées de tous».
Information AfricaLog: Les élections locales pourraient se tenir au mois de juin 2014.