[dropcap]L[/dropcap]es macros de nos formations politiques sont-ils devenus incapables de déplacer les lignes ? Tout semble le prouver. En tout cas, le caractère non inclusif du dialogue politique qui s’amorce est une illustration parfaite.
Dire que seuls les partis signataires des accords du 3 juillet 2013 sont concernés par le dialogue qui doit se poursuivre à compter du mardi prochain est un propos régressif et dangereux pour la démocratie. Au sens propre comme au sens figuré, une telle attitude est un recul.
Mouvance, opposition et entre elles le centre sont traversés de lignes qui coexistent, se superposent et se recoupent. Il y a des lignes dormantes, les lignes manifestes et des lignes qui disent s’expriment au nom de tous. Les dernières ont tendance à s’imposer à tous comme une évidence politique. Cette mise en scène dont « les grands partis » sont friands conduit les autres formations politiques dans une position d’esquive politique car, il n’est jamais facile de s’extraire d’un camp ou d’un autre dont l’unique ligne est la fusion absorption ou la soumission des partenaires ou alliés.
Pour mettre fin à cette situation, les petites formations politiques à l’image des petits actionnaires des grandes multinationales ont intérêt à se donner la main pour créer une minorité de blocage en concevant une nouvelle ligne pour être entendues et considérées ; à défaut, disparaitre.
Le discours-maître et l’inconsistance de la parole politique sont devenus inadéquats ou sans rapport avec ce à quoi le Guinéen est confronté. Le discours politique est devenu tristement vide et dévitalisé, d’une élection à l’autre. Fatalisme, diront les uns. Impuissance, diront les autres. Il n’y a qu’une seule ligne politique possible, qu’un seul modèle et qu’une seule fenêtre qui reste, la gestion de la réalité sociologique liée à la génération. Ce principe doit s’emparer de tout le personnel politique juvénile.
Tirer un trait sur l’actuelle politique de mise sous tutelle, c’est s’imposer une nouvelle conduite, c’est tracer d’autres traits et surfer là-dessus. Montaigne disait : « un beau trait est toujours de saison ».
Le personnel politique juvénile doit se détacher de l’ensorcellement qu’on lui applique, rompre les amarres et sa dépendance des éternels recyclés politiques.
René Char disait : « la réalité ne peut être franchie que soulevée. » Et c’est cette force de d’élévation que la jeune génération doit porter à l’horizon 2000 et au-delà au sein de la classe politique, du mouvement social, de l’administration et dans l’économie.
Le personnel politique juvénile actuel est un mélange de la révolution, du libéralisme et du multipartisme intégral. Le passage de l’un à l’autre et de l’un dans l’autre doit lui servir de terreau fertile pour porter sa vulnérabilité comme une orientation, ses émotions comme un programme et ses fragilités comme un argument.
Réussir un tel exercice de créativité, c’est déplacer les lignes et construire de nouveaux rapports non de force mais de composition non virtuelle. Au pont d’achèvement de l’exercice, la camisole politique sera élargie et deviendra un nouvel espace politique qui s’ouvrira à tous les acteurs.
Que Dieu bénisse la Guinée et les Guinéens !
Conakry, le 30 juin 2014
Honorable Cheick Tidiane TRAORE
Président du MPR