Ce mardi 7 janvier 2025, le tribunal correctionnel de Conakry a condamné l’opposant politique, Aliou Bah, président du Mouvement Démocratique Libéral (MoDeL) à une peine de deux ans fermes. Cette énième condamnation d’opposants, d’activistes pro-démocratie, d’acteurs de la société civile, d’artistes, de journalistes… vient s’ajouter à la longue série de dérives et de violations des libertés fondamentales en République de Guinée.
La Guinée, sous régime militaire depuis septembre 2021 (coup d’État du Colonel Mamadi Doumbouya sur Alpha condé), traverse une période d’instabilité politique ces trois dernières années, cristallisée par une confiscation du pouvoir par les autorités de transition.
La condamnation de Aliou Bah (arrêté le 26 décembre à la frontière de la Guinée avec la Sierra Leone), pour « offense et diffamation » à l’encontre du président de la transition, Mamadi Doumbouya, est l’une des dernières manifestations du musellement des voix discordantes par la junte guinéenne.
Ce verdict survient au lendemain de la manifestation du lundi 6 janvier 2025 appelée par les Forces vives de Guinée (FVG) dans le Grand Conakry pour exiger le départ des militaires au pouvoir qui sont dans “l’illégalité constitutionnelle” depuis le 31 décembre 2024. D’ailleurs, l’un des mots d’ordre de cette mobilisation était un appel au retour à l’ordre constitutionnel après l’arrivée à terme du calendrier de la transition.
Durant cette mobilisation, de violents heurts ont opposé les forces de l’ordre aux jeunes manifestants occasionnant la mort par balle de Mamadou Baïlo Sidibé âgé de 20 ans. Dans une déclaration publiée lundi soir, les forces vives ont déploré cette perte en vie humaine, tout en dénonçant l’usage des armes à feu et les “arrestations ciblées” par les forces de l’ordre.
AfricTivistes, en tant qu’organisation attachée à la défense des droits humains et aux libertés fondamentales, condamne avec véhémence cet usage disproportionné de la force qui menace la sécurité des personnes, conformément à l’article 2 de la Charte de la Transition de la République de Guinée.
Cette répression sur le terrain était accompagnée de la censure de plusieurs sites d’information tels que Africaguinee, guinee360, guinee7.com entre autres. Ces différentes plateformes étaient uniquement accessibles que via un réseau virtuel privé (VPN) et pour les utilisateurs en dehors du territoire guinéen.
Pour rappel, le journaliste Habib Marouane Camara et les leaders du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) – Mamadou Billo Bah et Oumar Sylla – tous enlevés, sont respectivement portés disparus depuis août 2024 et décembre 2024.
Depuis, aucune autorité n’a justifié ces arrestations sur le plan légal. Sans oublier les attaques répétées sur les libertés d’expression, de presse, de manifestation et d’association dans un contexte de dissolution d’une cinquantaine de partis politiques en octobre 2024.
Nous dénonçons ces attaques répétées contre la liberté de la presse et contre le droit à l’information.
AfricTivistes rappelle que ces enlèvements constituent une violation de l’article 8 de la Charte de la Transition de la République de Guinée, qui stipule qu’« aucune situation d’exception ne doit justifier les violations des droits humains ».
Ces arrestations, condamnations et kidnappings suscitent une grande inquiétude des intellectuels et des défenseurs des droits humains et constituent des atteintes continues des libertés fondamentales en Guinée depuis l’avènement au pouvoir du CNRD en septembre 2021.
Nous encourageons de ce fait les autorités compétentes et toutes les parties prenantes à travailler pour éviter d’éventuelles toute forme de violation aux droits individuels et collectifs.
Nous invitons les organisations internationales, les partenaires financiers et techniques, les institutions de défense de droits humains et les pays amis à porter une attention particulière à la situation de la Guinée.
AfricTivistes se tient aux côtés des populations, des médias et des militants pro-démocratie qui luttent pour le respect des droits et pour un retour à l’ordre démocratique.
Nous exhortons les autorités guinéennes à privilégier le respect des engagements contenus dans la charte de la transition pour un retour rapide au calendrier électoral.