Ultimate magazine theme for WordPress.

Alpha Condé candidat : la consécration d’un système de présidence à vie en Guinée ?

0

[dropcap]L[/dropcap]e débat autour d’un 3e mandat du président Alpha Condé qui agitait tant les Guinéens depuis plusieurs années à été tranché par le président. Contre vents et marées, il brigue un 3e mandat. Cela malgré la limite constitutionnelle;  la forte contestation citoyenne et l’âge du candidat (82 ans), avec des conditions physiques naturellement fragiles.

Mais cette annonce est loin d’être une surprise pour les Guinéens. Car après la destitution du défunt président « frontiste » de la Cour constitutionnelle M. Kéléfa Sall (par le décret présidentiel du 3 octobre 2018)  ; une série d’interviews spectaculaires devant la presse nationale et internationale sur le sujet; un combat impitoyable et déloyal contre le FNDC ; l’adoption d’une nouvelle Constitution taillée sur mesure ; la modification à huit-clos du texte constitutionnel juste après son adoption ; l’installation d’une Assemblée Nationale à la couleur du parti , nul ne doutait désormais de volonté du Président à briguer un 3ème mandat. Tout comme nul ne doute aujourd’hui  de sa victoire finale, si le processus arrivait à son terme.

C’est absolument décevant! Car aux yeux des Guinéens, particulièrement les jeunes universitaires, Alpha Condé incarnait les valeurs de démocratie et d’Etat de droit, vu son parcours universitaire et militant.

Consécration de fait d’un système de présidence à vie en Guinée :

Il est impératif que nos compatriotes comprennent que ce 3e mandat n’est que « l’arbre qui cache la forêt ». Car il s’agit en réalité de la mort du principe de l’alternance démocratique et de la consécration de fait d’un système de présidence à vie dans notre pays, le Koudeisme.

Si on laisse faire président Alpha condé, il ne serait plus possible de revendiquer ce principe comme étant une valeur intégrante au droit constitutionnel guinéen. Car jusqu’ici, on pouvait excuser la présidence à vie de Sékou Touré, par le fait qu’il était le père de l’indépendance et le premier président de la Guinée indépendante,  qui  avait peut-être besoin du temps pour mettre en place les fondements essentiels de notre nouvel État-nation.

On pouvait également excuser la présidence à vie du Général Lansana Conté, par le fait qu’il était tout simplement un militaire, peu cultivé et arrivée au pouvoir par un coup d’État militaire, notamment après avoir renversé M. Louis Lansana Beavogui, le président intérimaire après le décès de Sékou Touré.

Mais avec Alpha Condé,  il n’y a aucune excuse valable. Dans la mesure où on parle d’un président civil élu démocratiquement, avec le titre du « premier président démocratiquement élu en Guinée, un grand universitaire et « enseignant » de droit à la Sorbonne (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), ayant vécu 45 ans en France, pays de droit de l’homme et de démocratie. S’il est « réélu » pour son 3ème mandat, après un bricolage constitutionnel, ça serait une consécration de fait d’un système de présidence à vie en Guinée et la dictature en fin de compte.  Nous ne devons pas laisser faire cela, il faut donc agir et vite ! Mais.

Mais qui pour l’empêcher?

Sur le plan de personne, cela supposerait que l’on puisse trouver immédiatement un leader politique, religieux ou de la société civile (écrivain, artiste, universitaire…), capable de réveiller le sens patriotique des Guinéens venant des sensibilités politique, ethnique et religieuse différentes, pour mener ensemble ce combat commun.

Un leader politique ? 

Cellou Dalein Diallo de l’UFDG ? Absolument pas. Car en décidant cyniquement de participer à cette élection du 18 octobre, après avoir mené un combat mortifère contre Alpha Condé et son projet de troisième mandat, rejeté la nouvelle constitution, sur la base de laquelle est organisée cette élection, il perd toute crédibilité aux yeux des Guinéens qui se battent pour l’alternance démocratique. Il ne pourrait plus incarner le rêve de nos concitoyens.

Sidya Toure de l’UFR ? ! Il n’a ni le charisme, ni la crédibilité nécessaire, notamment a raison de ses va-et-vient entre le pouvoir  et l’opposition.

Lansana Kouyaté du PEDN ? Il est évidemment l’un des poids lourds de la politique guinéenne. Mais à raison de son absence quasi-permanente du combat politique au quotidien et de son éloignement géographique de nos concitoyens, il ne semble pas être celui qui incarne cette figure fédératrice.

Un leader religieux ? 

Le scénario malien revient régulièrement à l’esprit. C’est l’actualité. Mais il est difficile de trouver un Imam Dicko guinéen, capable de rassembler les Guinéens au tour de lui. La seule personne qui semble pouvoir incarner cette figure est sans doute Elhadj Mamadou Saliou Camara, le grand imam de la grande mosquée de Conakry. Notamment, à raison de son autorité morale et de son implication totale dans le processus de paix et d’unité nationale. Mais ce dernier ne semble absolument pas intéressé.

Sur le plan d’organisations politiques et citoyennes

FNDC ? Le FNDC semble clairement en déclin, au moment le plus important de son combat. Le report de sa manifestation prévue au 06 juillet dernier, le jour de désignation du président Alpha condé comme candidat du RPG Arc-en-ciel, en a été une preuve évidente.

Deux raisons principales peuvent expliquer cet échec. La première réside dans le fait que le FNDC, qui s’annonçait comme un mouvement purement citoyen, à l’image du balai citoyen burkinabè, s’est vite laisser absorber par les partis politiques classiques tels que l’UFDG dont la lutte politique divisait profondément les Guinéens. Le FNDC a adopté exactement la méthode l’UFDG. À savoir, l’organisation d’une série de manifestations successives, suivi directement par des journées ville-morte, enfin des cérémonies d’enterrement des victimes très spectaculaire au cimetière de Bambeto. Nos compatriotes n’étaient plus capables de distinguer l’UFDG et du FNDC.  Et malheureusement ce parti l’abandonne aujourd’hui en pleine baille.

Nécessité d’une coordination républicaine pour la démocratie, l’Etat de droit et l’unité nationale (CREDUN)

Face a ce déclin manifeste du FNDC et le manque incontesté d’une figure emblématique capable de rassembler les Guinéens dans leur diversité contre ce projet de présidence à vie, il devient urgent et impératif d’unir les forces au sein d’une organisation nouvelle. La coordination doit pouvoir rassembler toutes les personnes et organisations politiques et citoyennes engagées séparément dans ce combat.

Dans cette nouvelle organisation, le FNDC pourrait jouer un rôle moteur. En plus du  FNDC et ses composants, on peut citer le collectif pour une transition en Guinée CTG et l’Alliance pour l’alternance démocratique. Ces organisations doivent se réunir au plus vite pour définir ensemble, de façon consensuelle, les objectifs, les méthodes et stratégies de lutte.

Toutes les actions de la coordination pourront être  basées sur les valeurs de l’alternance démocratique, l’Etat de droit, l’unité nationale, et donc le rejet de l’ethno stratégie.

L’objectif de la coordination à court terme devrait être celui de faire renoncer Alpha Condé. Par conséquence, déclenchée une transition politique. Il est préférable que cela se fasse sans implication de l’armée. Mais la situation risque de  déboucher à cela, sans que cela soit le choix de la CRDEUN.

Sidiki CAMARA
Doctorant en Droit public économique  (CERAPS, Université de Lille)
Sc.pro224@gmail.com

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Suivez nous sur les Réseaux sociaux !

Cliquez sur les boutons ci-dessous pour suivre les dernières actualités de VisionGuinee.info