[dropcap]L[/dropcap]e président Alpha Condé ne se limite pas seulement à piétiner le libéralisme politique et économique de la Guinée, il l’en fait aussi à l’égard de ses réalités politico-économiques historiques.

On en sait déjà beaucoup sur Alpha Condé en ce qui concerne son opposition au triomphe du libéralisme, donc de la démocratie. Mais ce que beaucoup de gens savent moins sur l’homme, c’est sa détermination surprenante à nier, déformer, ou mépriser les réalités politique et économique historiques de la Guinée.

Le leader du RPG accuse : « le régime de Sékou Touré avait laissé de nombreuses usines en Guinée. Toutes sont tombées en faillite par la faute des cadres malinkés malhonnêtes ».

Un tel discours de la part d’un président qui se dit être professeur universitaire, et qui se glorifie d’avoir milité pendant 40 ans dans des formations politiques ou organisations sociales, qui avaient pour objectif principal la promotion de la vérité démocratique en Afrique, c’est absolument difficile à croire.

Difficile à croire ! Heureusement que dans les programmes d’enseignement en Guinée, à partir des classes du secondaire, les élèves guinéens peuvent déjà très clairement savoir les causes réelles, scientifiques ou rationnelles de la faillite des usines laissées par le régime de Sékou Touré.

Les causes rationnelles ou explicables de la faillite des usines du premier régime sont à chercher dans le model même de la nature du système politique qui les a créées. Le système politique socialiste dans lequel il n’est jamais question de propriété privée. Tout appartient à tout le monde.

Quand Sékou Touré est décédé, il est parti avec son système. Ce système devait obligatoirement disparaître, car le bloc communiste (les pays de l’Est) – auquel le dictateur s’était confié après le départ précipité et vengeur des colons français – n’en pouvait plus face à la suprématie du monde libre, le bloc capitaliste (les pays occidentaux).

Le régime de Lansana Conté qui est venu juste après Sékou Touré, en principe, n’avait pas d’autre choix que de suivre le mouvement du monde devenu globalisé, libéral.

Et le passage, ou la transition d’un régime à tendance socialiste vers un régime à tendance libérale, ce n’est pas si facile comme on change ses vêtements, ou comme le président Alpha Condé semble nous le dire dans ses accusations.

La Guinée seule n’a pas connu la faillite de ses usines après la fin du régime de Sékou Touré. La Russie après Michael Gorbatchev, la Roumanie après Nicolae Ceaucescu…, bref, tous les pays de l’Est connurent le même sort en choisissant de suivre la voie du marché libre : les nombreuses usines fermées, de nombreux gens au chômage.

La faillite due à la nature du système libéral qui veut que l’Etat intervienne moins, ou pas du tout dans la régularisation du marché. Ce qui signifie que les usines ou fabriques devraient être reprises par les particuliers, car l’Etat se désengageait de leur gestion.

Le problème – et cela a été le cas dans tous ces pays concernés- les particuliers ou les initiatives privées n’ont pas été si nombreuses pour reprendre ces usines. D’où l’origine principale de la faillite…

Alpha Condé accuse une catégorie de guinéens comme étant la seule coupable de la faillite des usines construites pendant le premier régime. Il sait que cela n’est pas la vérité, mais vu le niveau très élevé de l’analphabétisme dans notre pays, il en profite et déforme la réalité des faits par des manœuvres politiques démagogiques, qui consistent à récupérer les voix des nostalgiques de Sékou Touré, pour des besoins électoraux.

Naby Laye Camara
Bruxelles (Belgique)