[dropcap]L[/dropcap]a Guinée n’a pas un problème de Constitution, mais un problème de gouvernance. A la tête de ce problème, il y a le président Alpha Condé.
Si on accepte de le laisser faire ou de l’accompagner dans son désir de se maintenir au pouvoir à travers cette substitution illégale de constitution, rien n’exclut qu’un autre dirigeant ne veuille faire la même chose demain.
On ne peut pas permettre qu’à chaque fois la constitution ne sied pas aux humeurs d’un président, qu’il la remplace par une autre de son goût. La démocratie ne se construit pas dans l’instabilité constitutionnelle.
La Constitution est faite pour le pays et non pour quelqu’un. La soutenir ne veut pas aussi dire vouloir l’arrivée de Cellou Dalein Diallo ou de Sidya Touré au pouvoir. Nous devrions juste exiger du Président le respect de la Loi et l’organisation d’élections libres et transparentes afin que le peuple choisisse celui ou celle à qui il souhaite confier la gestion du pays à partir de 2020.
Le plus grand problème de la constitution actuelle c’est le manque de respect que lui accorde le pouvoir d’Alpha Condé. Il a carrément refusé de la respecter et pourtant c’est d’elle qu’il tire les fondements juridiques de son pouvoir car c’est sur la base de celle-ci qu’il a été élu et c’est aussi sur elle qu’il a prêté serment.
La Constitution exigeait qu’il mette en place toutes les institutions dans les six mois qui suivaient sa prise de fonction pour finir avec la transition. Malheureusement, il a fallu deux ans et des dizaines de morts pour qu’il accepte d’aller aux législatives. Il a fallu d’autres morts encore pour qu’après huit ans, il organise les élections locales.
Il a par ailleurs refusé d’installer à temps toutes les autres institutions du pays et jusque-là la Haute Cour de Justice n’est pas encore installée. Pourtant, s’il avait des problèmes avec le nombre d’institutions prévues ou avec d’autres dispositions de la Constitution, il aurait même pu les réviser à travers l’Assemblée Nationale. De toute façon, il aurait pu obtenir le soutien des députés de l’opposition, car ceux-ci ont accompagné presque tous ses projets de loi.
Malheureusement, tout au long de ces neuf ans à la tête du pays, il a montré que ce qui l’intéressait le plus, c’était de consolider illégalement son pouvoir en violant plusieurs dispositions de la Constitution. S’il n‘a pas été capable de respecter la Constitution, comment peut-il nous en proposer une autre et qu’est ce qui obligerait un autre dirigeant de respecter celle-là ?
Ce n’est pas parce que Lansana Conté avait procédé à une modification de constitution pour se maintenir au pouvoir, qu’on devrait permettre à Alpha Condé de faire autant. C’est d’ailleurs contre ce système que le peuple s’était levé entre 2006 et 2009 et on ne peut pas soumettre le pays à un cycle interminable de changements de constitution.
Abdoulaye BARRY ajbarry@live.com Portland, OR USA