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Arène politique : la danse des vedettes

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[dropcap]D[/dropcap]ans la forêt politique guinéenne, les émotions montent depuis un certain temps. Les déclarations sont de plus en plus aigres dans un contexte de dialogue inter-guinéen en panne et de discipline anti-Ebola généralisée.

opposition chez CellouDans les cercles politiques, on s’épie sans répit juste pour avoir matière à plainte politique. Parfois on le fait pour rappeler qu’on est là et qu’on est le meilleur pour 2015. La danse des vedettes recommence!

Deux anciens Premiers Ministres réunis en concertation loin du pays, à Paris, ont trouvé étonnante la traduction en français d’un discours prononcé outre Atlantique en langue nationale par un autre ancien Premier Ministre. Une sorte de thème vedette lorsqu’on tourne le dos aux sujets stratégiques du moment. Il paraît que ce partenaire politique aurait dit une chose de nature à ébranler une alliance de saison et égratigner une vieille amitié bâtie sous les balles des forces de l’ordre. De quoi justifier de malins voltes-faces. C’est à peine si les deux compères n’auraient pas risqué une certaine solidarité avec le camp qui crie tout le temps à l’ethnocentrisme en le pratiquant. Ils se sont séparés sans lever cette ambigüité. On ne sait comment avant le retour de l’un de ces leaders à Conakry, s’est brutalement rallumé ici, le vieux sujet de la candidature unique.

Les troupes de bavards n’attendaient que ça pour se livrer à des hypothèses de haute facture. Et de toutes parts montèrent des insinuations et même des affirmations de cession de parts de candidature.  Comme des actionnariats dans une entreprise. Alors les faiseurs de vedettes se mettent vaillamment en branle soit pour reconstruire des vedettariats perdus soit pour célébrer à qui mieux-mieux les qualités qui font des vedettariats montants. « Tel a cédé pour tel » ! chantent, en chœur, les dépendants politiques dans tous les royaumes vantards.

On raconte que les vedettes du camp au pouvoir ont vite fait de transformer cette contradiction mineure en une grande opportunité politique. Ainsi elles ont vite mis en vedette un des leaders de parti en organisant une miraculeuse descente militaire à son domicile.

Heureusement qu’aux yeux des populations de son quartier, ce leader est un bon notable. Autrement la vedette militaire virtuelle qui aurait osé défier la réforme des  forces de sécurité pour se réfugier chez cette vedette politique, lui aurait créé des ennuis. Ses partisans, eux, ont trouvé l’occasion opportune pour l’élever au statut alléchant d’unique leader politique redouté par le camp adverse. Donc c’est lui que tout le monde doit afficher sur les écrans encore sombres des compétitions à venir.

Qu’advient-il alors du Chef de file de l’opposition ? Les langues fourchues de Conakry ne perdent pas une seconde pour le déclarer consentant avec un forcing presque féroce. Des protestations et autres formes de démentis venus très tôt du côté attendu auront adouci les surprises mais n’auraient pas convaincu les surpris.

Plus tard des déclarations faites en présence des deux protagonistes politiques à Conakry amèneront des bribes de clarification qui n’ont rien clarifié dans cette autre énigmatique affaire d’amis.  Comme toujours en Guinée, il vaut mieux regarder les choses actuelles en diagonale et considérer que le passé est toujours plus clair que le futur. Hier on était ensemble pour un temps, c’est clair ! Aujourd’hui quelqu’un sème le doute sur le partenariat et arrose les milieux politiques d’une surprise plus forte que celle créée en son temps par le renoncement unilatéral à toute participation aux manifestations. Certes les témoins des accords électoraux redoutaient un lâchage chemin faisant et par certains alliés mais ils n’arrivent pas à comprendre les frottements politiques en cours dans le groupe-vedette de l’opposition républicaine.

D’autres échos venus de Paris annoncent qu’un leader frustré d’avoir été écarté par un allié puissant, crie franchement à la rupture. Il proclame que « Les liens politiques avec  cet allié, c’est fini ! ».  A lui, il faut reconnaître au moins le crédit de la sincérité politique. Hier, c’était « Oui », sans ambigüité ; aujourd’hui c’est « Non », sans détour sur un fond de vedettariat manqué. Comme il a des positions si claires, on peut négocier son retour à de meilleurs sentiments pourquoi pas au sein d’une alliance reformulée. Chez beaucoup d’autres, il est de notoriété publique que les positions sont si floues et pleines de pièges qu’elles deviennent impropres à des conciliabules sociopolitiques porteurs de triomphe électoral.

A côté de la mise en vedette de la Coordination de la Lutte contre Ebola, ce second semestre de crise sanitaire a fini par être une véritable saison des vedettes. Un parti politique choyé par le pouvoir a vu son leader porté à la plus haute distinction ministérielle dans la foule de conseillers en poste au sommet de l’Etat. Il a la charge de raviver en vedette, la molle collaboration entre les secteurs public et privé en Guinée. Désormais sa particule n’a guère besoin de chemises et fanions d’un rouge-vif pour montrer que dans la foule des partis politiques entrain de manifester, elle est l’amie incontestée de la mouvance jaune. C’est un vrai cadeau fait à  ce parti singulier afin de lui permettre de se faire plaire au grand jour dans la mouvance présidentielle sans se faire déplaire chez les amis d’une opposition qui a l’art d’accepter et subir naïvement toutes les trahisons.

En singleton téméraire, un autre leader, cette fois-ci apprenti politicien, est allé dans un fief électoral déverser son venin sur un patriarche politique vénéré et s’aventurer sans précaution dans les coins interdits du Grand Maitre du pays. Il voulait s’affirmer en vedette politique quand le venin toxique du pouvoir l’a vite neutralisé en rappelant que dans ce pays, il arrive que le droit soit dit. Quoi qu’il en soit les vedettes politiques ont compris que les offenses ne sont impunies que lorsqu’elles s’adressent à l’opposition. Mieux, celle-ci est impérativement invitée à soigner son langage si elle entend survivre dans ce pays où le règne ambiant s’étend, de jour en jour, dans des limites infinies.

Autre lieu, autre scène. Le Leader d’un parti dont le fief se réduit au « Bec du Perroquet » continue quant à lui, ses déclarations toxiques tantôt contre un allié électoral aujourd’hui désavoué tantôt contre un gouvernement d’où il fut congédié. Pendant ce temps, les militants de son parti, sentant les vaches maigres venir, s’en vont vers de juteux horizons politiques où ils font les mini-vedettes d’une reconstruction stratégique sans horizons.

En véritable vedette municipale, le Chef de la Ville de Conakry a choisi ce contexte pour faire un retour triomphal dans le parti de l’ancienne vedette économique du pays. On parle de réconciliation entre un patron et son employé politique. Une véritable stratégie-vedette pour effrayer le tuteur actuel et monter les enchères afin de préserver un poste administratif à hauts risques.

En effet la lutte contre les ordures n’a rien donné et faute de résultats, il faut trouver un refuge politique salvateur. Aller à la case-départ reconstituer des solidarités nocives pourrait sauver les meubles tout en affichant en vedette un parti politique en voie d’instrumentalisation avancée.

Parmi les silencieux sur la candidature unique, un porte-parole qui a déjà tout dit, s’éreinte à répéter ce que les guinéens sont fatigués d’entendre. Néanmoins c’est lui qui reste la vedette de l’opposition en matière de communication. Là-dessus, au moins, le consensus est total.

Le défi chez ses mandants est de lui trouver des stratégies consensuelles nouvelles pour l’émergence d’un nouveau vocabulaire. Celui qu’il utilise actuellement est devenu trop vieux sinon redondant ! La mouvance au pouvoir reste perchée sur ses certitudes de triomphe facile en toute saison. Habituellement brouillonne lors des combats électoraux, elle s’autorise sans limite à chanter sans répit les louanges de sa Vedette dans le but de récolte plus tard les fruits de positionnement dans les hiérarchies administratives. En ces temps d’exclusion, ce sera facile de conquérir sans compétence, une place forte à la mesure du vacarme qu’on a eu à animer contre les concurrents politiques. On profite des bras longs dont on dispose pour porter le plus haut possible, le drapeau de la démagogie intellectuelle et politique. Cela peut aller jusqu’à se faire rappeler qu’un journaliste de renom porte incontestablement le titre de correspondant « Numéro Un » d’une grande radio internationale.

C’est dans ce mélange de retrouvailles, de déclarations astucieuses et de querelles intestines que les deux composantes de l’opposition ont décidé, à contrecœur, de se retrouver en réunion de réveil stratégique. On y a confectionné une déclaration faite de morceaux de discours tirés au forceps, des centres d’intérêt des participants. Ces morceaux accolés, faute d’être une synthèse de poids face aux enjeux politiques majeurs, font au moins une consolation de fortune pour apaiser des frustrations partagées. On y a ajouté un peu de solidarité sous le soleil de Conakry à des vedettes politiques en grève de la faim pour le retour de la population martyre chassée du village de Womey.

C’est largement suffisant pour proclamer l’unité de l’opposition autour des questions brûlantes que lui posent une CENI receleuse et face à l’indifférence que le Maître du moment réserve à ses revendications. Néanmoins on travaille au Parlement où se sont retranchées les mouvances dominantes dans une récréation commune sur des chiffres socioéconomiques et budgétaires construits pour approfondir les divisons au sein du parlement et ragaillardir les opposants dans leur doute d’efficacité parlementaire.

On a tout simplement le très net sentiment qu’en jouant aux vedettes dispersées face à la Vedette, les partis de l’opposition semblent renoncer à élargir leurs chances de victoire en 2015. A cet égard on pourrait croire qu’ils affichent une intention crue à s’empêcher réciproquement d’arriver au pouvoir. Ce qui rappelle le discours évocateur d’un ancien leader politique, aujourd’hui Ministre de la Culture, prononcé lors des obsèques de Ba Mamadou en 2009. Il disait à peu près ceci avec un regret exprimant l’échec collectif d’une opposition alors éplorée: « Nous  autres opposants, avons empêché cet Homme d’arriver au pouvoir en dépit de ses qualités indéniables d’homme d’Etat et ses nobles ambitions pour la Guinée ». C’est à peine s’il ne reprenait pas une idée de Paul Valéry qui disait des égoïsmes humains : « il ne s’agit pas seulement de chercher à réussir, il s’agit d’empêcher les autres de réussir ».

C’est le jeu périlleux  auquel se livrent aujourd’hui les leaders d’une certaine mouvance politique. Si ce n’est celui d’une intelligentsia guinéenne embrouillée, morcelée et plongée dans d’éternelles querelles domestiques insensées. Le Peuple mobilisé de Guinée est aux aguets.

 Lamarana Diallo (in Le Populaire)

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1 commentaire
  1. Moussa Condé dit

    Très marrant comme texte avec un contenu classe!!!!!

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