[dropcap]I[/dropcap]l est 21h44 ce jeudi 3 août, quand le vol spécial affrété par l’OIM Libye atterrit à l’aéroport de Conakry-Gbessia, à son bord, 132 migrants guinéens, dont 6 mineurs non-accompagnés. Ces migrants, qui ont sollicité l’aide de l’OIM pour rentrer volontairement en Guinée, font partie des nombreux guinéens vivant en situation irrégulière en Libye, souvent dans des conditions difficiles.
L’OIM Libye et l’Ambassade de Guinée à Tripoli ont facilité leur l’obtention des documents nécessaires pour un retour humanitaire volontaire en Guinée. À noter que 3 malades ont reçu une assistance de la Croix-Rouge à l’arrivée à Conakry, avant d’être pris en charge par le Ministère de l’Action Sociale et conduits en ambulance à la Clinique Jean-Paul II dans une unité de soin dédiée aux migrants de retour.
Le vol charter a décollé de l’aéroport Mitiga de Tripoli jeudi 3 août à 18h05, et est arrivé à Conakry dans la soirée. L’OIM Libye a effectué des entrevues et des examens médicaux avant leur départ. Les migrants ont également reçu une assistance supplémentaire sous forme de kits, comprenant des vêtements et des chaussures.
Les équipes de l’OIM Guinée, du SENAH (Service National des Affaires Humanitaire), de la Croix-Rouge, des représentants du Ministère des Guinéens de l’Étranger et du Ministère de l’Action Sociale, étaient à l’aéroport pour les accueillir.
Les migrants retournés ont été pris en charge par l’OIM Guinée qui leur a fourni un kit comprenant des effets de toilette, ainsi que de quoi se restaurer. L’OIM a procédé ensuite à leur enregistrement et à leur profilage. Ces données, une fois analysées, permettront à l’OIM de mieux saisir le profil des migrants irréguliers, d’en savoir plus sur les raisons de leur départ, leur parcours migratoire et leurs conditions de séjour en Libye.
Après cette étape de profilage, l’OIM a remis à chaque migrant une enveloppe d’un équivalent de 50€, comme frais de transport secondaire pour rejoindre leur destination finale, en attendant d’étudier leur cas et ainsi pouvoir leur faire des propositions alternatives, pour assurer leur réintégration durable en Guinée, dans les trois mois suivant leur retour, dans le cadre du programme de : « Renforcement de la gouvernance des migrations et de support à la réintégration durable des migrants en République de Guinée » financé par le fonds fiduciaire de l’Union européenne.
Un soutien psycho-social a été apporté dès l’aéroport aux migrants vulnérables à travers des entretiens individualisés réalisés conjointement par l’OIM, le Ministère de l’Action Sociale et la Croix-Rouge. Lorsque nécessaire, un support additionnel assurera la prise en charge de leurs besoins immédiats.
Les migrants retournés résidants à Conakry ont pu rentrer directement chez eux, les autres, originaires des différentes régions de Guinée, ont été hébergés pour une nuitée par le SENAH au Centre de transit de Matam. Ils pourront ensuite rejoindre leur destination finale.
Parmi les migrants de retour, Habib*, tailleur. Il travaillait depuis 5 ans en Libye, propriétaire d’un atelier de couture avec ses deux frères. Un jour, un policier s’est présenté à lui, lui demandant de retailler un uniforme trop grand. La différence de taille était telle qu’Habib lui expliqua que la tâche était impossible, le policier se fâchât, poignardât le tailleur et le fit incarcérer.
Amadou* raconte son départ pour l’Italie, 5 bateaux lancés en même temps. Arrivés dans les eaux internationales, ils sont interceptés et capturés par des bandits. La mer est si agitée, qu’un des bateaux, face à l’assaut des vagues, coule avec près de 150 personnes à bord, des guinéens pour la plupart.
Le jeune Mamadou* 14 ans a quitté Boké il y a plusieurs mois avec l’argent d’une moto qu’il a revendue. Sa famille le croyait mort jusqu’à ce que des migrants guinéens, rentrés par un précédant vol de l’OIM, signalent sa présence au centre de détention de Ghryian. Les équipes de l’OIM Guinée et Libye ont alors collaboré pour retrouver et identifier Mamadou. Une photo prise dans le centre de détention par l’OIM a permis à sa famille de confirmer son identité. Son grand frère est venu l’accueillir à l’aéroport.
Depuis début 2017 (au 19 juillet), l’OIM Libye a aidé 5 546 migrants (dont 17% de femmes), en échec dans leur parcours migratoire, à regagner leur pays d’origine. Les trois-quarts d’entre eux étaient retenus en centre de détention. 2 221 sont admissibles à l’aide à la réintégration.
Le vol arrivé vendredi est le 6e depuis début 2017 organisé par l’OIM pour des migrants guinéens en provenance de Libye (les cinq premiers concernaient 595 personnes). Il s’ajoute aux retours d’autres ressortissants guinéens du Bénin, du Cameroun, d’Égypte, du Maroc et du Niger, également échoués dans leur parcours migratoire.
Pour rappel, le projet de « renforcement de la gouvernance des migrations et de support à la réintégration des migrants en République de Guinée » est un projet issu d’une initiative conjointe entre l’OIM et le Fonds Fiduciaire de l’Union européenne. Lancé en avril 2017, il sera mis en œuvre pendant une période de 3 ans et couvrira 6 régions administratives de la Guinée : Conakry, Boké, Mamou, Labé, Kankan et N’zérékoré.
Dans le cadre de ce projet, l’OIM Guinée assistera les migrants retournés, selon leur profil et leurs besoins, rendant possible la création d’une petite entreprise, l’implication dans une initiative entrepreneuriale collective et/ou communautaire, ou le suivi d’une formation professionnelle.
*Les noms des migrants ont été modifiés pour protéger leur vie privée.
Par Organisation Internationale pour les Migrations-Conakry