MTN Areeba la leur jette à la figure comme un pavé dans la marre, une patate chaude à avaler telle quelle, un départ souverainement décrété pour une soixantaine d’ingénieurs qui s’offrait encore la consolation de l’espoir. Même acariâtres et ronchonneurs à en revendre, ces Guinéens finiront éjectés des circuits de la société sud-africaine, au bout d’un mois. Qui dit donc mieux que la première entreprise de téléphonie libre de Guinée ? Eux, hier en travailleurs épousés, aujourd’hui en parasites à vomir, y a qu’à bénir le nom d’Areeba !
Oui bénissons, chantons encore les merveilles d’une société qui nous a arrachés à la tyrannie et à l’embargo de la Sotelgui, elle qui a ôté à nos yeux indigènes leurs écailles, quoique pour cela, chaque guinéen dût se plier, chez nous, à une facturation d’une rareté angélique. On nous chantonne encore à tout bout de champ ce refrain des illimitées bienfaisances d’MTN Areeba à l’égard de la population guinéenne et l’on s’attend à nous voir le reprendre à cœur joie ; en toute bonne conscience, j’attends qu’on me dise pourquoi je devrais.
Ce que j’ai contre MTN Areeba, ai-je d’ailleurs quelque chose contre elle, ce n’est nullement cette décision inhérente à la vie de toute entreprise ; un licenciement pour motif économique reste de l’ordre des actions qui, idéalement, ont toujours tenu la route. Ce qui me lacère tient, en revanche, à d’aberrants antécédents rendus plus indigestes par des mesures de licenciement sans commune mesure. Ici, elle offrirait généreusement trois mois de salaire à ses futurs ex-travailleurs tandis qu’ailleurs, dans un processus similaire, elle se serait fait l’obligation de leur verser entre autres mesures, treize et vingt long mois de salaires. Même faisant table rase de son réseau éminemment incertain, de la révision de ses plans tarifaires avec une telle soudaineté, de ses accointances avec les autres opérateurs dans la facturation à l’appel et des nombreux faux bonds à sa clientèle fidèle, l’autre dirait Foutaise !
Oui, une foutaise combien normale en Guinée ! Comme Rusal il y a quelques temps, Areeba s’en irait nous mettre le dos au mur du fait d’un Etat malade d’une mansuétude maligne. Sans l’agitation du moindre petit doigt, soixante guinéens et leurs familles s’apprêtent à affronter les galères du chômage. Ce sera bientôt pour eux la période des vaches maigres, celle des vivres coupés à leurs bouches devenues si friandes, si indélicates, celle où la source aura sèchement tari. Bref, MTN Areeba décrèterait la misère à ses ingénieurs télécoms sous les deux yeux de notre pseudo-Etat.
Je ne lui demande pas de faire la loi aux entreprises étrangères qui, naturellement, doivent pouvoir se gérer toutes seules. Je lui demande de prouver son existence, non pas par la force, mais par la reprise de ses nombreuses responsabilités longtemps rangées au placard. Il lui est impératif de soutenir toute action légale tendant à la valorisation de ses fils et filles ; il lui faut catégoriquement rejeter toutes actions faisant de la Guinée le parent pauvre de mesures reconnues hautement valorisantes ; dire non à ce traitement deux poids deux mesures, non à tout ce qui fait de la Guinée le réceptacle des bévues et de la ruse mondiale. Ce qu’MTN Areeba, groupe panafricain a fait ailleurs, pourquoi ne le ferait-il pas chez nous ?
Et dire qu’on m’avait appris que l’Etat existait aussi pour défendre les intérêts de ses citoyens, sans langue de bois, je me porte aujourd’hui à penser qu’on me racontait une laide salade !
Zacharie Millimono