07 octobre 2014-07 octobre 2016, qui ne se rappelle du flegme légendaire de ce bon vivant qui forçait admiration et respect ? Naby Youla avec son franc-parler désarçonnait plus d’un, alors qu’au fond il n’était amoureux que du beau et du bien pour tous. Un artiste à sa façon avec ce petit brin d’intello bien cambré et chapeauté.
Un esprit de partage et une vivace acuité intellectuelle qu’il su mettre au service de tous ceux qui ont de près ou de loin sollicité sa contribution. Feu Naby Youla de Fanyé subjuguait, en restant tout égal à soi-même.
Toujours scrutateur d’horizons, jamais pressé pour avoir quoique ce soit sur terre. Fruit d’une double scolarité coranique et française, il a vécu sur la ligne comme un équilibriste, sans renier sa ferveur islamique, ni tomber dans ‘’le tout hégélien’’. Ce fut un exemple de conduite et de fidélité qui disait aux extrêmes, qu’il était contre tout abus, contre toute dilapidation ou calomnie.
Le mardi, 7 octobre 2014 à 4 h du matin, le géant baobab s’affaissa et rendit son dernier souffle à jamais, dans une clinique de Conakry, comme pour accomplir son dernier devoir d’humain, donc de mortel. Toute la Guinée intellect, toutes les régions du pays et toutes les confessions confondues sans oublier les obédiences politiques et syndicales, ont fait cause commune pour honorer la mémoire d’un des derniers Mohicans, témoins de ce qui fit de la Guinée, un pays indépendant le 2 octobre 1958.
Parler ou écrire des lignes sur sa vie, c’est faire œuvre utile pour les générations de jeunes qui ont droit de savoir, de connaitre qui fut ou fait quoi pour cette Guinée. Il y a qu’on n’a pas de regret à dire ici que Naby Youla a fait son devoir de citoyen si amoureux de sa Guinée des plantations de banane, de manguiers, d’orangers et de champs de riz, des patates, de manioc… et d’ailleurs, tout simplement, de sa terre noire et ocre, symbole d’une richesse inouïe de mines et de végétations dispersées. Ce pays dépositaire de surfaces maritimes et fluviales jamais épuisables était son bien à lui.
Ce fils de paysan avant de mourir a donné libre cours à ses idées et pensées, ses regrets et espoirs pour sa nation. Nous vous en ferrons connaitre les points essentiels bientôt, en espérant que ses vérités sauront penser nos rancœurs et échecs au plan politique, économique et social. Car, aimait-il asséner : « La Guinée, qu’on le veuille ou non, restera la Guinée avec ses incongruités et ses chances naturelles, qu’il faille dompter tôt ou tard pour se sortir des labyrinthes de la pauvreté ».
S’agissant des dernières paroles du défunt à sa fille, nous vous laissons lire ce qui suit quand l doyen était encore vivant sur son lit de malade:
Naby Youla : Tu vois, Suzanne, je t’ai promis et je t’ai attendu.
Suzanne Youla : Oui je vois. Mais peux-tu me chanter encore un de tes morceaux préférés, dit Suzanne à son père.
Et Naby Youla de fredonné «Tikalama, a kha m’mariyé », faisant allusion à son unique amour de sa vie, Marie Habib Touré, une métisse de Kankan, mère de Suzanne. Ce, en symbole de sa fidélité à jamais à ses deux exceptionnelles créatures qui l’ont tout donné, avant d’ajouter : « Qu’on m’enterre au près de mon épouse à Cameroun si jamais… », en laissant lire sur son visage ce sourire qu’il adorait distiller à ses proches. Notez que Naby Youla a eu 63 ans de vie commune avec la mère de Suzanne.
Ceci nous amène à faire un clin d’œil à l’homme au double plan familial et sentimental, avant de dérouler sa vie, disons une brève introduction à sa riche biographie, jamais égalée par personne en Guinée pour le moment, au vu de ce qu’il fut tout au long de sa vie. Car à deux ans de sa disparition, il nous a été donné de retracer son parcours pour le compte d’un magazine. Une vie faite de hauts et de bas, allant d’épreuve à épreuve sans jamais discontinuer, jusqu’au soir de sa disparition.
On avait encore le sentiment de veiller sur les derniers flots respiratoires d’un géant d’une énorme stature qui plane encore sur les têtes de ses contemporains, partenaires ou adversaires. Oui, disons-le, Naby Youla a drainé sans le vouloir estime et désamour, pour ce qu’il fut durant les régimes politiques de notre passé récent de 1958 à 2014. Qu’on l’aime ou pas, il a incarné la Guinée diplomatique à ses débuts, avant d’être exclu des fiches des tombeurs de De Gaulle en 1958.
A part sa force et sa capacité diplomatique, nos chancelleries à travers le monde savent que ce Monsieur fut un As, si non, en quoi le pays s’enorgueillissait, à part le coup fatal à la France coloniale. Il fut un adepte de la libre expression. Sans le savoir, opposant à la pensée unique qui commençait à prendre pied au pays dès après les premières années d’indépendance.
Naby Youla est témoin de l’ambiguïté qui aura valu au chef de la France de 1958 et à sa Ve République, de perdre presque tout de ses territoires d’outre-mer. La faute à qui, à part ce grand diplomate qui fut tout près des français avec sa conscience patriotique et sa fougue de faire de la Guinée, l’égale de n’importe quel Etat en matière d’auto-détermination.
Sur la liste donc des pères fondateurs de la Guinée, qu’il soit retenu en lettre d’or, si nous voulons rendre justice à la nation et à tous ses valeureux fils et filles. Insistant de ce coup auprès des autorités nationales d’accepter de commémorer la mémoire de ce fils émérite qui a tout fait pour la victoire de son pays. Nous travaillons sur les idées et les bonnes initiatives à propos.
Avant la France c’est au Maroc que sa carrière a démarré, alors que dans les faits, sa carrière aura son envol international bâti à partir de Paris. Paris qu’il connaissait depuis sa jeunesse, étudiant, puis stagiaire dans divers services en France, avant d’être compté parmi les hauts cadres guinéens de la diaspora africaine de France.
Va ! Dors Naby Youla ! Mais veille sur nous, élégance et expertise diplomatique jamais inégalée !!!
Par Aboubacar Sidick SAMPIL