[dropcap]L[/dropcap]es ministres européens des Affaires étrangères doivent se réunir lundi au Luxembourg pour «galvaniser» la réponse européenne à l’épidémie d’Ebola qui, selon une ONG internationale, menace de devenir «l’ultime catastrophe humanitaire de notre génération».
Le dossier s’est hissé en haut de l’agenda européen, alors que le bilan de cette fièvre hémorragique dépasse les 4.500 morts, selon les derniers chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Selon des sources européennes, les 28 plancheront lundi sur un «état des lieux global» qui recense les moyens disponibles et une série d’options pour intensifier la lutte contre l’épidémie.
«L’enjeu est de galvaniser l’action européenne», a souligné un diplomate européen. «Il y a un réel sentiment que nous sommes à un moment crucial et qu’il faut agir maintenant», a-t-il ajouté.
L’épicentre de l’épidémie est en Afrique de l’ouest, au Liberia, Sierra Leone et Guinée. Mais des cas isolés sont apparus en Europe, avec la contamination d’une aide-soignante espagnole, et aux Etats-Unis, provoquant des réactions de panique et la mise en place de contrôles sanitaires.
Ne pas perdre la bataille
L’UE est sous pression pour dégager plus de fonds, et surtout envoyer plus de personnel formé sur place. Selon une source européenne, l’idée est d’articuler l’aide internationale autour de trois «pays leaders», les Etats-Unis pour le Libéria, la Grande-Bretagne pour le Sierra Leone, et la France pour la Guinée.
L’ONG humanitaire britannique Oxfam a appelé samedi à «une présence militaire accrue, davantage de médecins et de fonds pour éviter l’ultime catastrophe humanitaire de notre génération».
Dans un communiqué, l’ONG incite les pays européens à suivre l’exemple de la Grande-Bretagne dont un navire médicalisé est parti vendredi pour le Sierra Leone. Londres prévoit d’envoyer 750 militaires dans cette ancienne colonie pour aider notamment à la construction de centres de traitement.
La France et l’Allemagne insistent de leur côté pour mettre en place un dispositif coordonné d’évacuations sanitaires, jugé indispensable pour assurer le flux de renforts européens.
Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE se saisiront du dossier jeudi et vendredi, lors d’un sommet à Bruxelles. Dans un courrier à ses partenaires, le Premier ministre britannique David Cameron les presse de s’entendre «sur une nouvelle série de mesures» face à «la crise d’Ebola».
Il souhaite que l’aide européenne soit portée à un milliard d’euros, alors que le montant actuel s’établit «autour de 500 millions d’euros» dont 180 millions d’euros pour la seule Commission européenne, selon un diplomate.
Le dirigeant britannique veut aussi «accentuer la coordination pour le contrôle des points d’entrée» en Europe.
Ces appels font écho à ceux de l’ONU qui s’est inquiétée vendredi que son appel à près d’un milliard de dollars n’ait été satisfait jusqu’à présent qu’à hauteur de moins de 40%.
«Nous sommes en train de perdre la bataille» face au virus, avait déploré, vendredi à Paris le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim.
Ne pas céder à l’hystérie
Sous la pression de l’opinion, les Etats prennent de leur côté des mesures de précaution en ordre dispersé.
Samedi, la France a mis en place un contrôle sanitaire à l’arrivée à Roissy du vol quotidien Conakry-Paris d’Air France, seule liaison directe entre la France et les pays affectés.
Cette surveillance est déjà en vigueur en Grande-Bretagne et dans plusieurs aéroports américains, même si pour l’OMS, la priorité doit rester aux contrôles au départ des pays affectés.
Mais l’inquiétude reste vive. Un cas suspect a été ainsi placé à l’isolement samedi soir dans un hôpital militaire de la région parisienne.
Soucieux d’éviter la psychose, le président Barack Obama a demandé samedi aux Américains de ne pas «céder à l’hystérie ou à la peur», et à la tentation de restreindre les liaisons avec l’Afrique de l’ouest.
Le pays ne fait pas face à une «épidémie», a assuré le président des Etats-Unis, où deux membres du personnel soignant ont été infectés et où un patient libérien, de retour de son pays, est mort du virus dans un hôpital de Dallas, au Texas.
Dans ce contexte, l’unique information positive est l’annonce par l’OMS que le Sénégal, qui avait déclaré un cas, désormais guéri, ne doit plus être considéré comme un pays touché.
Il devrait en être de même lundi pour le Nigeria où l’épidémie a été stoppée trois mois après l’arrivée du premier malade dans le pays le pays le plus peuplé d’Afrique. Grâce à une réaction rapide, le bilan y est de 20 cas, dont huit mortels.