
[dropcap]S[/dropcap]ituée à 48 kilomètres du centre-ville, Banguigny est l’une des trois sous-préfectures de Fria qui, aujourd’hui, reste la plus enclavée. Serait-elle oubliée par l’Etat ? Pour toucher du doigt les réalités, votre quotidien en ligne y a fait un tour. Arriver à Sodjoré, chef-lieu de Banguigny relève d’un parcours de combattant en raison de l’état piteux de la route.
Lors d’un récent séjour dans cette sous-préfecture, Mme le préfet de Fria, Nialen Condé, a menacé de priver cette localité de toute assistance de l’Etat, excepté dans le domaine de la santé. Une annonce qui a fait réagir les ressortissants de Banguigny qui s’étaient fendus d’une lettre ouverte, publiée sur VisionGuinee.
A voir comment fonctionne l’administration à Banguigny, on est en droit de se poser la question de savoir si la menace de dame Nialen Condé n’a pas atteint sa phase d’exécution. De l’école élémentaire au collège, du centre de santé en passant par la résidence du sous-préfet ou encore le bloc administratif abritant les bureaux de ce dernier et du secrétaire communautaire, le constat est alarmant.

A Banguigny, l’administration ne fonctionne que les jeudis
Lundi, premier jour de la semaine, aucun fonctionnaire n’est visible au bloc administratif. Résidence et bureaux sont fermés, envahis par des herbes. Le visiteur est accueilli par des toiles d’araignées, du bétail qui occupe les lieux en longueur de journée en lieu et place des fonctionnaires. Pas besoin de chercher le tricolore guinéen, il n’existe tout simplement pas.
Interrogé par nos soins, Yéro Oury Diallo, Gold pour les intimes, habitant de la localité, nous confie avec amertume : ‘’Ici, l’administration ne fonctionne que les jeudis, le sous-préfet, le secrétaire communautaire et tous les autres résident à Fria. Ils viennent mercredi soir pour rentrer jeudi. Il leur arrive de rester à Banguigny jusqu’au vendredi matin’’.
Le chef du secteur de Sodjoré, Amadou Bailo Diallo dit Pointeur ne nie pas cette évidence. Pour lui, l’absence de l’Etat ne date pas d’aujourd’hui. ‘’Il ne faut pas accuser les autorités actuelles. Nous sommes nés et avons grandi à Banguigny. L’administration a toujours été absente. Il ne faut donc pas rendre Mme le préfet responsable de cette situation’’, répond-il à ceux qui pointent du doigt dame Nialen Condé.
Il rappelle que les ‘’ressortissants de cette localité l’accusent d’ailleurs d’avoir insulté la population et d’avoir menacé de priver Banguigny de toute assistance de l’Etat. Je m’inscris en faux. Elle n’a jamais insulté. Quand elle venue, c’est moi qui tenait le procès-verbal. Ce sont les politiques qui nous divisent’’.

Assis à l’ombre d’un arbre, Thierno Abdoul Madina lance un appel aux administrateurs territoriaux. ‘’Nous nous sentons abandonnés. Les administrateurs habitent tous à Fria-ville. Nous demandons aux autorités de bien vouloir se stabiliser ici pour qu’on se familiarise’’, plaide-t-il.
Les autorités se défendent
Joint au téléphone pour des besoins de recoupement, le sous-préfet de Banguigny, Mamadouba Camara dit être à Fria pour déposer un rapport d’activités. ‘’Vous ne m’avez pas averti avant d’aller à Sodjoré. J’y étais la semaine dernière. J’aurais pu vous attendre. Une fois à Fria-ville, appelez-moi pour qu’on se voit’’, nous dit-il au bout du fil.
Rejetant en bloc l’information selon laquelle l’administration ne fonctionne que les jeudis à Banguigny, Lamarana Mamou Diallo, secrétaire communautaire affirme que les responsables de la sous-préfecture étaient à Fria avec le préfet au moment de notre visite. ‘’Nous travaillons à Sodjoré du lundi au vendredi. Vous pouvez appeler Mme le préfet, elle va vous confirmer qu’on était à son bureau en début de semaine’’, indique-t-il.
Chef du centre de santé de Banguigny, Cécé Benoit Zogbélémou confie à VisionGuinee que son centre ne dispose que de deux agents. ‘’Nous sommes débordés par le nombre de malades qu’on reçoit par jour. Dans ce centre, il n’y a que deux agents. Parfois, je reste jusqu’à tard la nuit. Nous sollicitons auprès des autorités l’envoi de plus d’agents de santé à Banguigny’’, plaide-t-il.
Dans le même ordre d’idées, il demande aux ressortissants de Banguigny de s’organiser afin de contribuer davantage au développement de leur localité.
Ciré BALDE, pour VisionGuinee.Info
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