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Gestion des ordures de Conakry : le triomphe du bricolage

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[dropcap]J[/dropcap]e crois qu’il faut être de de mauvaise foi pour ne pas convenir avec le Président Alpha Condé lorsqu’il déclare ne pas être responsable de l’état calamiteux de la gouvernance, des infrastructures économiques et des services sociaux de base. Il ne peut être comptable du déficit chronique et notoire de la fourniture d’électricité, d’eau, de logements sociaux, des voies de communication… Il a trouvé les Guinéens trempés dans la corruption jusqu’à la moelle. Conakry ville sale

Mais on devient dubitatif et frappé de frayeur lorsque le Professeur Alpha Condé avertit les Guinéens qu’il reprend la Guinée là où Sékou Touré l’a laissée. Tout le monde sait que la Guinée était bien mal en point à la mort de Syli en 1984. Déjà à l’époque, contrairement à ce que ‘’les révolutionnaires’’ veulent faire croire, des pans entiers de la gouvernance chancelaient et la qualité de la fourniture des services laisser à désirer.

A vrai dire, dès 1958, le bricolage a pris une place importante dans les stratégies de développement. Si nombre d’initiatives pertinentes de l’époque de la révolution n’ont pas été concluantes, c’est parce que très souvent elles n’ont pas fait l’objet d’une minutieuse étude de faisabilité. Elles ont été conçues et mises en œuvre dans la précipitation, dans un environnement de surcroit d’hérésie politique. A l’exception du premier plan triennal, la plupart des plans de développement n’ont pas produit les résultats attendus. C’est bien sous la révolution que les infrastructures héritées de la colonisation et celles bien rares, qui ont été construites après, se sont dégradées et sont devenues parfois quasi inutilisables.

Le processus même d’acquisition du savoir formalisé s’est fortement empreint de bricolage. Que reste-t-il à présent de l’enseignement des langues nationales, enseignement qui aurait pu (peut-être) être à l’origine du recul du français si la reforme avait été scientifiquement conduite.

Le bricolage s’est naturellement poursuivi sous le régime des militaires, après 1984. Le développement pensé et bâti autour d’une vision clairement définie et calée à un horizon temporel ne date-t-il pas seulement de 1996, suite à la nomination de Sidya Touré à la Primature ?

Increvable, d’emploi aisé et propice à la corruption, le bricolage sert de technique s’assainissement de la ville de Conakry depuis longtemps. Il apparait comme la panacée trouvée par les gouverneurs qui ont géré la ville durant les 20 dernières années. Les habitants de la capitale ont découvert des gouverneurs passionnées, voire zélés, allant de commune en commune, animer des mamayas de curage de caniveaux, de collecte d’ordures ménagères, dans les marchés e au coin des rues. On a par moments, l’impression que les Gouverneurs ont une compréhension réductrice de leurs fonctions d’administrateur urbain, tant les ordures de la ville paraissent les accaparer et s’emparer de leur énergie.

Nulle autre fonction de l’espace urbain ne parait leur inspirer une initiative qui valorise leur statut et leur rôle au sein du microscope politico-administratif. Malheureusement pour eux, cette débauche d’énergie renvoie à la montagne qui accouche d’une souris. Même les observateurs les moins avisés constatent qu’une immondice d’ordures s’élève aussitôt qu’une autre disparaît.

Les pauvres gouverneurs ! Ils ressemblent à Sisyphe, ce personnage de la mythologie grecque condamné à pousser au sommet d’une colline un rocher qui, toujours, en redescend. Le fait est que ce bricolage ne permettra jamais d’assurer durablement la propreté de la ville de Conakry. Le troc de vieux pneus ramassés çà et là par les populations contre des sacs de riz n’est qu’un succédané. Les gouverneurs/Gestionnaires de la capitale à l’exemple de leurs collègues maires d’ailleurs, doivent devenir imaginatifs et trouver des salutations idoines de collecte des ordures ménagères. Sans doutes couteuses, ces solutions sont les seules qui valent, même si elles doivent valoir à l’Etat des allocations budgétaires ad hoc. Ces solutions consistent à susciter la mise ne place d’une structure publique ou privée de collecte et de traitement des ordures ménagères.

En fonction du principe ‘’du pollueur-payeur’’, la municipalité dirigée par un Maire élu qui doit un jour ou l’autre, remplacer l’hybride Gouvernorat de Conakry, fera financer en partie, à travers des taxes et des impôts, le nettoyage de la ville par les producteurs des déchets solides. Le bricolage n’a jamais été une solution durable. Ses résultats font toujours long feu.

Par Abraham Kayoko Doré

Article paru dans La Lance Numéro 901 du 21 mai 2014

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