Les populations guinéennes sont en train de subir un véritable supplice lié à l’attente des résultats de la circonscription électorale de Matoto. Pitié pour la Guinée, est-on tenté de crier ! En effet, trois semaines après les élections législatives, le verdict de ce vivier électoral de Conakry se fait toujours attendre.
Et pour cause, les premiers chiffres qui donnaient l’opposition en tête, avec une avance de l’ordre de 300 suffrages, sont contestés par le pouvoir qui a déposé plusieurs recours. La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a donc décidé de tout recompter. Si cette opération fastidieuse d’arithmétique électorale participe de la transparence du scrutin, il faut cependant relever, que le temps mis pour le dépouillement peut exaspérer les Guinéens et la communauté internationale.
Pourtant la Guinée donne l’impression de vivre à « l’âge de la pierre taillée », comparativement à son voisin, la Côte d’Ivoire.
Déjà, les observateurs de l’Union africaine (UA) ont quitté le pays, abandonnant ainsi les seuls observateurs envoyés par l’Union européenne et, bien sûr, les pauvres Guinéens à leur sort. Encore une fois, l’Afrique a fui ses responsabilités. Elle s’est illustrée de la mauvaise manière, en refusant d’assister un peuple en danger. Pour peu qu’elle soit responsable, elle devrait en avoir honte. C’est pourquoi, il faut saluer la patience et la ténacité des membres de la mission d’observation électorale de l’Union européenne qui, à leur corps défendant, jouent désormais un rôle d’apaisement et de garant face à une crise de confiance absolue entre le pouvoir et l’opposition.
Décidément la Guinée ressemble à bien des égards, à ce grand oiseau des mers, l’albatros, dont le gigantisme des ailes empêche de bien marcher sur la terre ferme. En effet, le pays, à tous points de vue, a d’énormes richesses. D’abord, c’est un véritable scandale géologique ; son sous-sol renferme d’immenses minerais dont l’exploitation judicieuse peut assurer le développement économique et social du pays. Pourtant la Guinée donne l’impression de vivre à « l’âge de la pierre taillée », comparativement à son voisin, la Côte d’Ivoire. Ensuite, la Guinée est riche de ses intellectuels. Rares sont les pays africains qui peuvent se vanter d’avoir un tel potentiel humain de qualité.
La Guinée a un mal chronique à ses hommes politiques. Ceux-ci, faute de vision pour leur pays, ont vite fait d’instrumentaliser les ethnies, divisant ainsi les populations pour mieux régner.
Dans ce vivier de l’intelligentsia africaine, toutes les compétences sont réunies : écrivains, ingénieurs, médecins, journalistes, etc. Enfin, la Guinée est un haut lieu de culture et d’histoire. De grands empereurs et autres guides spirituels ont laissé un patrimoine riche qui fait d’ailleurs toujours la fierté de toute l’Afrique. La Guinée rassemble donc les ingrédients matériels et immatériels pour être grande et servir de vitrine de développement, de démocratie et de progrès social pour la sous-région. Hélas ! tel un albatros, la Guinée est victime de son envergure. Parmi ceux qui l’en empêchent, il y a notamment ses hommes politiques, qui ont réussi le tour de force d’installer le pays dans la violence, la suspicion généralisée, la délation, bref, la chienlit. Les prérequis du vivre-ensemble n’existent pas en Guinée.
Pourtant, le pays, en 1958, avait pu séduire l’Afrique progressiste en optant pour la dignité et l’indépendance face à la France du général De Gaule. Depuis lors, la Guinée porte le bonnet d’âne en termes de dictature, de violations massives des droits de l’Homme, de mauvaise gouvernance politique et économique. La Guinée a un mal chronique à ses hommes politiques. Ceux-ci, faute de vision pour leur pays, ont vite fait d’instrumentaliser les ethnies, divisant ainsi les populations pour mieux régner.
Alpha Condé doit véritablement rompre avec ce passé en ne perdant pas de vue le grand destin qu’il prédisait pour l’Afrique et pour la Guinée alors qu’il était le leader de la Fédération des étudiants d’Afrique noire de France (FEANF). Il doit être aidé en cela par tous les Guinéens épris de paix, de justice, de démocratie. C’est le minimum qu’ils doivent à la Guinée.