Dans le passé récent de la Guinée, d’innombrables remous politiques et sociaux ont été enregistrés à travers le pays. Des manifestations organisées ou spontanées sont souvent enregistrées à plusieurs endroits du territoire national. Seulement, dans la gestion de ces manifestations par les services publics, on assiste à une logique de deux poids et deux mesures, pourquoi ?
Pendant le régime défunt, la Guinée a connu le plus grand nombre de manifestations populaires de son histoire. Elles sont de plusieurs ordres : ce sont souvent des revendications politiques qui emmènent des leaders de l’opposition en général, d’investir les rues pour se faire entendre par les autorités. C’est aussi pour exiger la fourniture des services sociaux de base tels que l’eau l’électricité, de meilleures routes etc.
A l’intérieur du pays et notamment dans les zones d’exploitation minière, ce sont des travailleurs qui se lèvent pour exiger de meilleures conditions de vie et de travail. Ou encore, ce sont des communautés riveraines des sites miniers qui se lèvent soit pour réclamer la mise en application des accords dans le cadre du contenu local ou parfois pour exiger l’emploi de leurs ressortissants par ces sociétés.
Dans tous les cas, dans une situation de manifestations populaires qui tournent souvent à la violence ; les forces de défense et de sécurité interviennent pour rétablir l’ordre et sécuriser les personnes et les biens, du moins nous apprend-on. Ces équipes d’intervention sont souvent composées de policiers et de gendarmes, mais aussi des autres corps des FDS tels que les militaires, les bérets rouges notamment. Ils sont munis de matraques, de bombes lacrymogènes qui sont reconnues comme étant des armes conventionnelles en matière de maintien d’ordre.
Par contre, il arrive parfois qu’ils soient munis d’armes létales qu’ils ont été utilisées contre des populations civiles non armées. C’est d’ailleurs dans ces conditions que des centaines de citoyens Guinéens ont été abattus à bout portant pendant ces soulèvements populaires, sans oublier que des blessés, souvent par projectiles ont été enregistrés dans les rangs des forces de maintien d’ordre.
Dans les débats qui entourent ces soulèvements populaires, les représentants de l’Etat, notamment le Ministère de la sécurité qui est souvent pointé du doigt, les portes paroles des différents gouvernements arguent que ce sont des faits qui se passent partout ailleurs dans le monde, que ce sont des pratiques et faits propres aux démocraties surtout naissantes. C’est généralement des situations où on a l’Etat d’un côté et les victimes de l’autre. Nous avons assisté à des enquêtes et des arrestations depuis l’avènement du CNRD au pouvoir mais avant 2021, aucun suspect n’avait jamais été présenté au public dans le cadre d’une procédure judiciaire quelconque, malgré le grand nombre de victimes.
Admettons que les manifestations et leurs corolaires sont des faits qui existent partout, même dans les grandes démocraties où on assiste parfois à des scènes de violence entre manifestants et forces de maintien d’ordre. Cependant, en Guinée un fait reste remarquable : les manifestations populaires se passent sur l’ensemble du territoire mais on tue d’un côté.
Les expéditions punitives sont plus violentes et mortelles dans la commune de Ratoma à Conakry que dans les autres localités du pays. C’est un constat fait par de nombreux observateurs de la vie politique et sociale de notre pays. Comment peut-on expliquer ce deux poids deux mesures des forces de maintien d’ordre ? Pourquoi des citoyens d’un même pays, régis par la même constitution et les mêmes lois sont traités de manières si différentes ?
Boubacar DIENG