[dropcap]P[/dropcap]our asseoir les bases démocratiques de la Guinée, nous avons besoin d’hommes de la trempe de Nelson Mandela de l’Afrique du Sud et d’Adolfo Suárez d’Espagne. Des patriotes en mission et déterminés qui mettent les intérêts de leur pays au dessus des leurs. 

M. Suarez a prouvé qu’avec la détermination et le sens du devoir on peut fondamentalement changer une Nation qui avait pourtant passé près d’un demi-siècle sous la dictature de Franco et la guerre civile. Il suffit d’avoir le courage de ses convictions et s’entourer de personnes intègres et déterminées.

Après la mort du dictateur conservateur Francisco Franco en novembre 1975, le roi Carlos nomme le nationaliste M. Suarez au poste de premier ministre pour ne pas trop irriter les Conservateurs. Cependant, le premier ministre étant un visionnaire, surprit tout le monde en engageant de réformes démocratiques très profondes, en libérant tous les prisonniers politiques et en démantelant toute la machinerie politique qui servait le despote Franco et qu’il aurait pu utiliser à son service.

Imaginez un peu si au lieu de se servir des réseaux corrompus et mafieux hérités du régime de Conté pour assoir son pouvoir, le PRAC s’était attelé à les démanteler, il aurait pu peut-être nous conduire à un renouveau. Imaginez, si à son arrivée au pouvoir Alpha Condé s’était uniquement attelé à construire un Etat démocratique dans le vrai sens du mot, ça aurait fait de lui un héros.

La démocratie ne se résume pas uniquement à l’organisation d’élections, il faut créer et développer la culture démocratique et le respect des institutions et des textes légaux. La démocratie ne se pratique pas pour obtenir et conserver le pouvoir mais pour construire une nation et assurer le bonheur de ces citoyens dans le respect de leurs droits et de leurs choix…

Être démocrate c’est accepter le débat contradictoire et accepter qu’on n’aura pas toujours raison. C’est aussi savoir organiser des élections et se résigner à la possibilité de les perdre. En bref, c’est savoir respecter son peuple et les choix de son peuple.

Le pouvoir n’est qu’une obligation temporaire de servir et non un privilège pour asservir.

Alpha Condé aurait dû savoir que son devoir était de conduire une transition démocratique pour construire les institutions républicaines et procéder à un nettoyage systématique de l’administration publique. Il en avait la latitude et le peuple entier lui aurait soutenu dans cette démarche comme le peuple l’avait fait pour Dadis.

Hélas. Le PRAC, une fois arrivé au pouvoir, était beaucoup plus intéressé à démanteler son opposition politique qui est pourtant nécessaire dans tout pays démocratique, que de démanteler, les réseaux narco, mafieux et les réseaux de corruption qui ont leur tentacules dans toutes les structures étatiques.

C’est pourquoi, pour moi , Alpha Condé restera un échec et une déception à moins qu’il ne change. Aucune des infrastructures qu’il réussira à construire ne sera perenne et ne fera de lui une figure historique positive nationale. Son héritage est à jamais tinté par ses dérives ethnico-politiques et il ne fera jamais l’unanimité en tant que figure historique nationale. Il sera célébré par les uns et haï par les autres comme ses prédécesseurs.

Heureusement pour lui, il n’est pas encore trop tard s’il a envie de bien faire.

M. le président, en deux ans vous pourriez vous rattraper si vous le désirez et je vous suggère de profiter de ces élections communales pour engager une nouvelle dynamique. Sachez que le peuple ne se souviendra pas de vous pour vos “usines” de purée de tomates ou de pommes, ou de tablettes ou de tracteurs mais pour la nation que vous aurez construite dans une paix durable.

Abdoulaye Barry
Portland, OR USA
ajbarry@live.com