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Il y a 27 ans disparaissait Thomas Sankara…

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[dropcap]I[/dropcap]l y a 27 ans survenait le coup d’État du 15 octobre 1987 au Burkina Faso. Cet événement majeur de l’histoire du pays est aussi le jour de la mort de Thomas Sankara.

L'ancien leader de la révolution burkinabè, en 1986. © Pascal Maitre / Jeune Afrique
L’ancien leader de la révolution burkinabè, en 1986. © Pascal Maitre / Jeune Afrique

Certaines thèses parlent d’une mort « accidentelle » survenue lors de son arrestation, alors que Sankara se serait montré hostile. Les organisateurs du coup d’État le justifièrent en évoquant une dérive dictatoriale du leader révolutionnaire. Blaise Compaoré affirmera en outre que Sankara avait prévu de l’exécuter.

Cependant, les témoignages et l’absence d’enquête sur la mort de Sankara (un manquement condamné par le comité des droits de l’homme de l’ONU en 2006) ont plutôt tendance à accréditer la thèse plus communément admise de l’assassinat pur et simple. Quand au coup d’État, la nature des changements apportés ensuite par « la rectification de la révolution » menée par Compaoré, cette « ouverture démocratique », à savoir en premier lieu le retour de l’ex-Haute Volta sous l’influence française, vient compléter de nombreux éléments démontrant de probables implications étrangères dans le renversement de Sankara.

Le capitaine Sankara fut le père de la révolution burkinabée et dirigea le pays de 1983 à 1987. Son anti-impérialisme et son panafricanisme, magistralement illustrés par son discours à l’ONU en 1984 au cours duquel il affirma son souhait de voir les peuples africains s’engager dans une voix autonome, indépendante et non-alignée de développement, furent intimement liés à sa vision marxiste : « Ceux qui veulent exploiter l’Afrique, déclara-t-il, sont les mêmes que ceux qui exploitent l’Europe. »

Son marxisme sera aussi le fil directeur de ses réformes internes : réformes agraires, lutte contre la désertification, alphabétisation, amélioration des réseaux d’eau, mise en place d’instances démocratiques locales, émancipation sociopolitique de la femme, ou encore modération des ordres sociaux traditionnels et inégalitaires. À l’instar des révolutionnaires cubains, Sankara imbibera sa révolution d’un fort esprit patriotique. Et en juillet 1987, il déclarera devant les chefs de l’OUA que la dette (sous-entendu celle contractée auprès d’institutions étrangères) était un instrument pour faire des pays d’Afrique des « esclaves financiers ». Moins de trois mois avant sa mort, il posait cette question sans équivoque : « Qui ici ne souhaite pas que la dette soit purement et simplement effacée ? »

Modèle de courage, d’intégrité et de dévouement, Sankara est en voie de réhabilitation au Burkina Faso. Son aura est mondiale, aussi bien sur le plan du panafricanisme, que sur celui de l’esprit national-révolutionnaire en général.

Source: Egalité et Reconciliation

2 commentaires
  1. CIJS dit

    https://www.youtube.com/watch?v=xzxgzuCZU-g
    le point sur l’affaire Sankara et sa commémoration
    Merci

  2. CIJS dit

    CIJS
    Campagne Internationale Justice pour Sankara

    Les membres de la CIJS (Campagne Internationale Justice pour Sankara) saluent la mémoire des martyrs de la révolution de l’automne 2014 au Burkina, l’avènement de la charte de la transition ainsi que l’investiture de l’exécutif qui a été désigné. Ils reconnaissent avoir été sceptiques, conscients que les deux ténors de l’exécutif sont liés au dispositif géopolitique qui enserre la sous région. Cependant, tous deux, malgré leur cumul de pouvoirs, ont pour l’instant traduit patriotiquement les aspirations issues de l’insurrection populaire qui a débarrassé le pays de son régime honni. La CIJS respecte le choix du collège de désignation et fait aussi sien l’esprit de tolérance et de vigilance essentiels à cette période de transition d’un an.
    Profitant de ce régime d’exception, le Président intérimaire Kafando a déclaré lors de son investiture :
    «Au nom de la réconciliation, j’ai aussi décidé, par le fait du Prince, que les investigations pour identifier les restes du président Sankara ne seront plus assujettis à une décision de justice mais seront du ressort du gouvernement, aujourd’hui même, à cet instant même cette autorisation est accordée».

    Tout en se félicitant d’une telle déclaration, la CIJS estime que ces investigations doivent se réaliser dans le respect des procédures légistes et légales et ne doivent pas se limiter à la simple identification des restes du Président Sankara, mais également aux circonstances de son assassinat et celle de ses camarades, afin que la page de l’impunité soit définitivement tournée et la réconciliation scellée. En somme, identifier la tombe du président rime avec l’identification et la poursuite de ses assassins.

    Pour rappel, entamée en 1997, la Campagne internationale a épuisé tous les recours juridiques au Burkina et a été déboutée honteusement en Cour Suprême par une magistrature instrumentalisée par le régime Compaoré. Le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU, saisi ensuite par la CIJS, avait considéré que ‘’suite à l’arrêt No 46 de la Cour Suprême du Faso du 19 juin 2001, rendant définitif l’arrêt N° 14 de la Cour d’Appel, déclarant les juridictions de droit commun incompétentes, les autorités du Burkina Faso ont refusé de renvoyer la cause aux juridictions du Ministre de la Défense afin que des poursuites judiciaires soient engagées devant les tribunaux militaires, tel que prévu à l’article 71(1) et (3) du code de justice militaire» et que le procureur avait arrêté à tort la procédure que nous avions engagée. Le comité avait donc statué :
    « La famille de Thomas SANKARA a le droit de connaître les circonstances de sa mort (…) Le Comité considère que le refus de mener une enquête sur la mort de Thomas SANKARA, la non-reconnaissance officielle du lieu de sa dépouille, et la non rectification de l’acte de décès constituent un traitement inhumain à l’égard de Mme SANKARA et ses fils, contraire à l’article 7 du Pacte».
    « En vertu du paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’Etat partie est tenu d’assurer un recours utile et effectif à Mme SANKARA et ses fils consistant notamment en une reconnaissance officielle du lieu de sépulture de Thomas SANKARA, et une indemnisation pour l’angoisse que la famille a subie ».
    « L’Etat partie n’a pu expliquer les retards en question et sur ce point, le Comité considère que, contrairement aux arguments de L’État partie, aucune prescription ne saurait rendre caduque l’action devant le juge militaire, et dès lors la non-dénonciation de l’affaire auprès du Ministre de la défense revient au Procureur, seul habilité à le faire. «… »

    Le régime Compaoré a proposé différents recours non contentieux; du Collège des sages; de la Commission de réconciliation nationale; du Fonds d’indemnisation des victimes de la violence en politique ; du Médiateur du Faso. Or ces recours n’étaient pas des recours utiles. Ayant par la suite, par la complaisance de certains experts de l’ONU, échappé malgré tout à la justice le régime Compaoré s’est de nouveau retrouvé confronté à la détermination de nos avocats. Ils ont requis la désignation d’un expert ou un laboratoire indépendant notoirement reconnu, habilité à procéder à l’identification des empreintes génétiques et un calendrier de procédure a été établi le 09 février 2011. Le 11 mars 2011, l’Etat Burkinabè a soulevé l’incompétence du Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, et l’irrecevabilité de la demande. Puis la tombe présumée de Thomas Sankara a été vandalisée le 28 juillet 2011. Le régime de Blaise Compaoré, affirmant que c’était le fait d’un déséquilibré mental, annonça le déploiement d’une unité de police afin d’assurer la sécurité de la ‘’présumée’’ tombe jouxtant toujours des immondices de la décharge voisine. Seulement 2 ans et 4 mois après, la tombe présumée a été de nouveau profanée, malgré les policiers de faction devant la porte principale du cimetière. Par jugement en date du 30 avril 2014, la demande de la CIJS d’identification des empreintes génétiques a été rejetée, ledit tribunal se déclarant incompétent.

    Blaise Compaoré était aussi Président du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM). La magistrature a été tellement gangrenée par l’impunité qu’elle a été volontairement exclue du processus de la transition. Seule une magistrature assainie pourrait veiller à ce que la lutte contre l’impunité soit effective, avec des cours et des tribunaux intègres et impartiaux et soucieux des libertés individuelles et collectives. Une assemblée constituante corrigerait les manquements graves occasionnés par la soumission du corps judiciaire à l’exécutif, mais aussi veillerait à la réforme de l’armée. Nonobstant cette exigence, et prenant acte de la position courageuse d’autoriser l’investigation sur l’identification du corps du président Thomas Sankara, nos avocats recommandent que celle-ci soit effectuée dans les règles du droit assortie de toutes les garanties d’impartialités afin que le fardeau des preuves ne soit d’aucune façon entaché d’irrégularités.

    La CIJS escompte que le pouvoir de transition saura démocratiquement trouver le cadre juridique de probité et d’impartialité, pour que ses avocats achèvent leur travail de 18 ans et que la vérité et la justice adviennent. La CIJS réitère ses demandes pour que les sociétés civiles de France, des États Unis et de Côte d’Ivoire aident à y faire divulguer les responsabilités dans l’assassinat de Thomas Sankara. Elle remercie le peuple du Burkina de son soutien, l’enjoins de jouer son rôle de veille et d’encadrer plus que jamais cette lutte contre l’impunité.
    -30-

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