Institutions électorales indépendantes : socle d’élections crédibles et de stabilité durable en Guinée
Dans une démocratie digne de ce nom, la qualité des élections ne dépend pas uniquement des bulletins de vote ou du calme dans les urnes. Elle repose avant tout sur la confiance que les citoyens accordent à l’institution chargée d’organiser le scrutin. En Guinée, cette question reste à la fois cruciale et dramatiquement négligée.
Alors que le pays se prépare à de nouvelles consultations électorales, la réforme de l’organe de gestion des élections (CENI ou son équivalent futur) devrait être un enjeu central du débat public et politique. Hélas, cette question stratégique est reléguée au second plan, au profit des calculs partisans et des ambitions électorales précoces.
Or, sans institution électorale indépendante, il ne peut y avoir ni élections crédibles, ni paix post-électorale durable. L’histoire récente de notre pays — marquée par des contentieux électoraux, des soupçons de fraudes, et des violences tragiques — en est la preuve implacable.
La crédibilité commence par l’arbitre
Un organe électoral digne de ce nom doit être juridiquement indépendant, financièrement autonome, composé de personnalités compétentes, éthiques et non partisanes, et ouvert au contrôle citoyen et à l’observation internationale.
Ce n’est qu’à ces conditions que l’on pourra restaurer la confiance, désamorcer les tensions, et éviter que la rue ne devienne le dernier recours de ceux qui se sentent exclus du jeu démocratique.
Une réforme urgente et non négociable
Il est temps que la classe politique guinéenne — majorité comme opposition — s’accorde sur une réforme profonde, transparente et inclusive de l’organe électoral. Cette réforme doit être adoptée en amont de tout calendrier électoral, afin de ne pas être perçue comme biaisée ou opportuniste. Les élections ne doivent pas être des épreuves de force. Elles doivent être des exercices de confiance nationale, où chaque citoyen a la certitude que sa voix compte, et que les résultats reflètent la vérité des urnes, non la volonté des puissants.
Pour une paix durable et une démocratie réelle
Sans institutions fortes, les alternances ne sont que des épisodes, les tensions restent latentes, et la gouvernance s’enracine dans la défiance. C’est pourquoi la crédibilité électorale n’est pas qu’un enjeu technique ou juridique : c’est une condition de la paix civile, de la stabilité politique, et du développement économique.
La Guinée n’a plus le droit à l’erreur. Chaque étape de la transition actuelle doit être une fondation, non un faux-semblant. Et parmi ces fondations, l’indépendance des institutions électorales est sans doute la plus décisive.
C’est pourquoi j’en appelle à toutes les forces vives — politiques, civiles, religieuses, sociales — pour faire de cette exigence une priorité nationale. Car un pays qui veut la démocratie doit d’abord commencer par respecter l’arbitre du jeu démocratique.
Boubacar Dieng