[dropcap]U[/dropcap]ne CENI technique n’est pas forcément la solution. D’ailleurs, une CENI technique ne peut exister en Guinée actuellement car l’esprit partisan est présent chez presque tout le monde.
Les problèmes de la nouvelle loi sur la CENI sont les mêmes dont souffraient la précédente. Pourquoi ce nombre pléthorique de 17 commissaires ? À mon avis, ce nouveau bébé est un « mal-né » car il souffre des mêmes déformités que le précédent.
Toute réforme aurait dû tenir compte des problèmes majeurs de dysfonctionnement qui sont liés à la CENI actuelle. Le nombre pléthorique, le déséquilibre politique au sein de l’organisation, la corruption, les détournements, etc.
Notre CENI est politique sans l’être. Les commissaires sont, dans leur majorité, issus des partis politiques mais une fois à la CENI, ils ne sont plus représentants des partis qui les y ont envoyés. La CENI devrait assumer son statut d’organe représentatif de partis politiques.
À mon avis,
- Il nous faudrait une CENI avec seulement sept (7) commissaires. Trois (3) pour l’opposition, trois (3) pour la mouvance et un (1) qui sera le représentant de nos partenaires techniques et financiers (Union Européenne). Ceci permettrait d’éviter les conflits au sein des structures regroupant les partis politiques car ce qui est à partager ne sera pas beaucoup. Il ne devrait y avoir de représentants issus de la société civile ou du gouvernement. Même si en théorie, ceux-ci ne doivent pas avoir de parti pris, mais en pratique, ils sont toujours partisans.
- Il faudrait aussi exiger un quorum d’au moins cinq (5) commissaires pour la validité des décisions de la CENI. Ainsi, si une partie se sent lésée et décide de boycotter les activités de la CENI, celle-ci ne pourra plus prendre de décision. Donc ceci va les obliger à travailler dans le consensus.
- Il faut aussi que les décisions soient prises par la majorité des deux-tiers (2/3), c’est-à-dire qu’il faudrait au moins cinq (5) commissaires pour prendre une décision. Dans ce cas, aucun groupe ne pourrait imposer sa volonté sur les autres. Dans la nouvelle loi, seul le règlement intérieur requiert une majorité des deux tiers (2/3).
- Les commissaires devraient servir selon la volonté des structures qui les ont désignés. Pour que les commissaires restent loyaux à ceux qu’ils sont censés représentés à la CENI, l’opposition et la mouvance devraient avoir le pouvoir de rappeler et de remplacer leurs commissaires.
- La composition de la CENI devrait être revue après chaque élection présidentielle ou législative afin qu’elle reflète les réalités politiques du moment.
- La gestion des fonds alloués par la CENI devrait être assurée par les commissaires et les décisions financières devraient être soumises aux mêmes règles que toutes les autres décisions de la CENI. Le président de la CENI ne peut en lui seul prendre une décision sans l’accord des deux tiers des commissaires.
- La paix et la stabilité dans notre pays étant tributaires d’une bonne CENI, les délibérations et le vote des commissaires devraient être publics afin que les citoyens soient informés de ce que la CENI fait en leurs noms.
- Il faudrait enfin recruter des techniciens qui seront les travailleurs ou les fonctionnaires de la CENI. Ceux-ci seront recrutés par la CENI sur la base de leurs compétences et leur recrutement doit être approuvé par tous les commissaires.
- Ces techniciens ne devraient pas émarger à la fonction publique. Ils ne devraient rendre compte qu’aux commissaires et peuvent être renvoyés à tout moment si un des groupes (mouvance, opposition, partenaire) n’est pas satisfait de leur travail. Ainsi, ces techniciens ne chercheront pas à satisfaire un seul groupe au détriment de l’autre.
- La CENI devrait être aussi soumise à un contrôle financier régulier. À la fin de chaque élection, elle devrait justifier toutes les dépenses exécutées. Ce contrôle devrait être fait par un cabinet d’audit indépendant recruté sur la base d’un appel d’offre.
Enfin, ce dont nous avons vraiment besoin en Guinée de façon générale et en particulier à la CENI, ce sont des patriotes. Des hommes et des femmes qui mettront l’intérêt du pays au-dessus des leurs ou de toute autre personne. Sans cela, toute réforme sera vouée à l’échec.
Abdoulaye BARRY
ajbarry@live.com
Portland, OR USA
Vous êtes toujours insatisfait vous voyez le diable partout