En Guinée, le diabète est devenu un véritable problème de santé publique. La sédentarité aggrave le risque de cette maladie qui touche tout le monde. Pour parler de cette maladie que vivent de nombreuses familles guinéennes aujourd’hui, VisionGuinee est allé à la rencontre du Dr Mamadou Chérif Diallo, médecin endocrinologue, diabétologue et nutritionniste à l’hôpital national Donka. Il évoque des différents types de diabète, des principales causes, des facteurs de risque, des habitudes alimentaires, de la génétique, des plaies diabétiques et de la contribution de l’État dans les soins.  

VisionGuinee : Pouvez-vous nous parler des différents types de diabète et leurs caractéristiques principales ?  

Dr Mamadou Chérif Diallo : Le diabète est un problème de santé publique majeur et ça touche tout le monde. Personne n’est épargné, ni les adultes ni les enfants. Avant de vous parler des différents types de diabète, disons que le diabète, en termes simples, c’est quand le taux de sucre s’élève de façon permanente dans le sang. Ce diabète peut toucher plusieurs personnes. Personne n’est épargné, et on a plusieurs catégories de diabète. On a le diabète de type 2, qui survient généralement chez les adultes, près de 80 %, voire 90 %, des diabétiques sont de type 2. On a le diabète de type 1, qui survient le plus souvent chez les enfants.

On a aussi d’autres types particuliers de diabète, c’est-à-dire secondaires à une pathologie endocrinienne ou à une maladie génétique. Et il y a un quatrième groupe de diabète qu’on appelle le diabète gestationnel, qui survient au moment de la grossesse et disparaît généralement après l’accouchement.

Parmi ces types de diabète, lequel est considéré comme le plus dangereux en Guinée, et pourquoi ? 

Aucun n’est plus dangereux qu’un autre. Que ce soit le diabète de type 1, de type 2, secondaire ou gestationnel, tous causent des problèmes de santé si la personne est atteinte. Maintenant, en termes de fréquence et de conséquences à long terme, le diabète de type 1 et de type 2 constituent des problèmes de santé majeurs, puisqu’ils deviennent des maladies chroniques.

Une maladie chronique, si elle n’est pas prise en charge à temps et de façon optimale, entraîne des conséquences à long terme, donc des complications. Les complications immédiates peuvent être un coma acidocétosique ou hyperosmolaire, et les complications à long terme peuvent conduire à la perte de la vue, à des problèmes rénaux, à une crise cardiaque ou à un accident vasculaire cérébral (AVC), c’est-à-dire des paralysies. En termes simples, si le diabète n’est pas pris en charge à temps… Mais pour le diabète secondaire et le diabète gestationnel, si on enlève la cause, généralement tout revient à la normale.

Quelles sont les principales causes du diabète ?

Disons que le diabète en général est multifactoriel. Il n’y a pas une seule cause, mais plusieurs facteurs qui concourent à sa survenue. Par exemple, pour le diabète de type 2, le plus fréquent, toute personne âgée de plus de 40 ans a un risque de devenir diabétique. Si vous êtes en surpoids ou en obésité, vous pouvez aussi développer le diabète. Le manque de consommation de fruits et de vitamines, la sédentarité, le fait de ne pas bouger suffisamment, et des antécédents familiaux avec parents diabétiques augmentent également le risque.

Qu’en est-il des facteurs génétiques, alimentaires ou du mode de vie héréditaire ?

Il n’y a pas de transmission verticale automatique. Ce n’est pas parce que papa ou maman a le diabète que l’enfant l’aura forcément. Mais si les parents en ont, il faut agir sur les facteurs modifiables notamment l’alimentation, les activités physiques pour éviter de le développer. C’est l’interaction entre les facteurs génétiques et environnementaux qui favorise la survenue du diabète.

Quels sont les principaux facteurs de risque qui favorisent le diabète ? 

Le premier signe du diabète, c’est qu’il n’y a pas de signe. Le diabète peut exister pendant des années sans aucun symptôme. Mais s’il n’est pas dépisté à temps, la glycémie continue à monter. Quand elle est trop élevée, les symptômes apparaissent : soif intense, faim excessive, perte de poids, fatigue, infections répétées avec des plaies chroniques, infections génitales chez les femmes. Mais à ce stade, la maladie est déjà avancée. La meilleure façon de savoir si on est diabétique, c’est de faire un dépistage, surtout en présence de facteurs de risque.

Quelles sont les habitudes alimentaires ou comportements que les patients diabétiques doivent absolument éviter ?  

Il n’y a pas d’alimentation spécifique pour les diabétiques. Il faut une alimentation saine et équilibrée pour tous : trois repas par jour, en privilégiant des aliments moins gras, moins sucrés, moins salés. Le petit-déjeuner doit être léger pour fournir de l’énergie, le déjeuner plus consistant pour soutenir l’activité et le dîner léger, car le corps se prépare au repos. Cette alimentation doit être adaptée à chaque personne, selon ses possibilités, sa localité et ses habitudes. On ne peut pas imposer un régime unique.

Certaines plaies diabétiques peinent à guérir pas malgré les soins. Quelles en sont les causes principales et comment prévenir cette situation ?  

Dire qu’elles ne guérissent pas est excessif, mais leur guérison peut être retardée. Quand le diabète n’est pas équilibré, l’excès de glucose dans le sang favorise les infections. Si la glycémie est bien contrôlée, les plaies cicatrisent normalement. La meilleure prévention, c’est d’accepter le traitement, respecter les consignes, et consulter régulièrement pour ajuster le traitement.

Quelle est la contribution de l’État guinéen dans la lutte contre le diabète ?  

Pour le diabète de l’enfant, l’État a un partenariat avec le laboratoire Novo Nordisk, un programme prend en charge gratuitement les enfants de 0 à 18 ans. L’État facilite l’accès aux médicaments, leur stockage, et forme le personnel soignant.

Récemment, l’État a aussi acheté des médicaments essentiels pour les diabétiques. Avec la CNPS (Caisse nationale de prévoyance sociale), les fonctionnaires bénéficient d’une couverture, mais il faut étendre cela à toute la population via la couverture sanitaire universelle. Le diabète est une maladie coûteuse, mais des efforts sont en cours.

Quels sont les principaux obstacles dans la prise en charge du diabète en Guinée ? 

Nous avons l’accès aux soins spécialisés est difficile, surtout dans les zones rurales. Le manque de moyens économiques des patients et le faible nombre de spécialistes, moins de 40 en Guinée, sont aussi des défis.  L’université de Conakry forme des paramédicaux à la gestion du diabète pour décentraliser les soins. Des progrès sont faits, mais il faut renforcer ces actions.

Pourquoi les crises d’évanouissement ou de perte de conscience surviennent-elles souvent chez certains diabétiques de type 1 ? 

Leur traitement repose sur l’insuline, dont l’effet secondaire principal est l’hypoglycémie. Si la dose n’est pas adaptée ou mal administrée, le taux de sucre chute brutalement, causant une perte de connaissance. Il faut éduquer les patients et leur entourage à reconnaître les signes d’hypoglycémie et à réagir vite.

Est-ce que le stress peut faire monter la glycémie ? 

Oui, le stress augmente la sécrétion de cortisol, l’hormone hyperglycémiante. Ce qui peut élever la glycémie.

Quel conseil donneriez-vous aux patients diabétiques et à leurs familles ?  

Le diabète n’est pas une fatalité. On peut vivre normalement avec un suivi rigoureux : respect du traitement, activité physique, alimentation équilibrée, et consultations régulières. Il faut aussi informer l’entourage pour qu’il puisse aider en cas d’urgence.

Salimatou BALDE, pour VisionGuinee.Info 

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