L’Histoire retiendra : En soutenant Doumbouya, certains Guinéens ressuscitent le parti-État de Sékou Touré (opinion)
« Lorsque l’histoire bégaie, elle n’est pas farce… mais tragédie. » À la veille d’élections cruciales, alors que la Guinée peine encore à sortir de la transition militaire, un constat s’impose : certains Guinéens, sciemment ou naïvement, soutiennent la candidature du Général Mamadi Doumbouya. Mais ce soutien n’est pas anodin. Il participe, de fait, à la résurrection d’un vieux monstre politique : le parti-État, un système que l’on croyait mort et enterré avec la disparition d’Ahmed Sékou Touré en 1984.
Le parti-État : souvenir d’une dictature
Le Parti Démocratique de Guinée (PDG-RDA), sous Sékou Touré, avait concentré tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme. L’appareil d’État, l’armée, les médias, l’économie et la justice étaient inféodés au parti. L’opposition était criminalisée, la pensée libre muselée, et des milliers de Guinéens ont payé le prix fort dans les geôles de la dictature.
Aujourd’hui, alors que la Guinée aurait pu rompre définitivement avec cet héritage tragique, le pouvoir du CNRD, soutenu par une partie de la population, semble réactiver les pires réflexes autoritaires. Campagnes déguisées, instrumentalisation des médias d’État, répression des voix critiques, clientélisme rampant, mouvements de soutien téléguidés… Tous les ingrédients d’un système de confiscation du pouvoir sont réunis.
Soutenir Doumbouya : un choix ou un aveuglement ?
Il est de la responsabilité de tout citoyen conscient de comprendre les implications politiques de son choix. Soutenir un candidat issu d’un coup d’État militaire, sans alternance, sans débat d’idées, sans bilan transparent, c’est normaliser l’illégalité institutionnelle et tourner le dos à l’histoire. Le risque n’est pas seulement un recul démocratique, c’est la codification d’un pouvoir personnel travesti en projet national.
Refusons la résignation
La Guinée n’a pas besoin d’un retour au parti-État. Elle a besoin d’un État de droit, d’institutions fortes, d’alternance pacifique et d’une gouvernance au service du peuple. Soutenir la candidature du Général Doumbouya aujourd’hui, c’est poser une pierre à la reconstruction d’un système que des générations entières ont combattu, parfois au prix de leur vie.
L’histoire jugera
L’Histoire retiendra les noms, les discours, les silences et les complicités. Elle retiendra que des Guinéens, en 2025, ont consciemment soutenu la restauration d’un système autocratique sous les habits d’un pouvoir transitoire*. Mais elle retiendra aussi ceux qui ont dit non. Ceux qui ont résisté. Ceux qui ont porté haut les valeurs de démocratie, de justice et d’alternance
La Guinée mérite mieux qu’un remake des années noires. Elle mérite un avenir. À nous de le bâtir
Boubacar Dieng