[dropcap]M[/dropcap]arie Kenneth Guilavogui, militante du RPG Arc-en-ciel, critiquant l’opposition, affirme que « la politique n’est pas faite pour n’importe qui. Qu’on peut être un bon intellectuel, et ne pas être un bon politicien ».

Je partage absolument cette affirmation de Me. Guilavogui. Surtout quand elle ajoute: «Les opposants doivent encore avoir une formation de base en politique…. Alpha Condé est un bon  politicien. Quand tu passes une seule journée à ses côtés, tu apprendras beaucoup en politique qui te suivra pour le reste de ta vie ».

En interprétant Me. Guilavogui, il n’y a pas l’ombre d’un doute qu’elle partage l’idée selon laquelle les opposants à Alpha Condé sont de bons intellectuels, mais pas de bons politiciens. Qu’ils doivent d’abord chercher une formation de base en politique  à fin de   se mesurer au leader du RPG.

Cependant,  si je partage les affirmations de la militante du RPG, je suis convaincu qu’il  y a une réalité derrière ses  mêmes  affirmations que Me. Kenneth Guilavogui ne soupçonne pas. Voyons !

La politique est le processus par lequel les communautés poursuivent des objectifs communs, et abordent leurs conflits dans le strict respect  d’une structure de règles, avec l’objectif d’arriver aux solutions.

Il est donc clair qu’une politique qui ne se plie pas aux exigences de la loi et des institutions,  ne pourra pas résoudre les problèmes de la société.  Une politique qui ignore que les partis politiques  sont des acteurs principaux dans la réussite des politiques publiques et du processus électoral,  sera à l’origine des tensions sociales, de l’instabilité politique.

Comme nous pouvons le remarquer, la bonne politique n’est autre chose que le fait  de se conformer à la structure de règles. La mauvaise politique contrevient à la structure de règles. Donc, le bon politicien est un amoureux des exigences légales. Le mauvais politicien, l’individu qui  contourne et néglige toutes exigences légales.

 Alpha Condé est au pouvoir depuis 2010. Et depuis, il faut le reconnaître, la Guinée connaît l’instabilité sociale et politique. Cela signifie, sans commentaires, que le pouvoir d’Alpha Condé fait mal la politique. Le pouvoir de Conakry néglige et contourne la structure de règles et des institutions qui sont capitales dans la gestion sérieuse d’une nation.

Alors quand Me. Kenneth Guilavogui avance que le président Alpha Condé est un bon politicien, il y a l’incompréhension. Si Alpha Condé était un bon politicien, la Guinée n’en souffrirait pas autant comme elle l’est aujourd’hui. Si Alpha Condé appliquait la bonne politique,  la société guinéenne ne serait pas  aussi divisée comme elle l’a jamais été dans les régimes précédents.

Sur ces mots, il faut avoir le regret d’annoncer à la militante du RPG Arc-en-ciel, Me. Guilavogui, sans tourner autour du pot, que le président Alpha Condé n’est pas un bon politicien. Un bon politicien, quand il agit mal, il assume ses responsabilités, et n’accuse ni Pierre, ni Paul, ni Ebola, ni anciens premiers ministres, comme moyens échappatoires.

En revanche, si Alpha Condé est un mauvais politicien, il faut le  reconnaître qu’il est un bon partisan passionné  de la politique politicienne. La politique politicienne, voilà ce à quoi, réellement,  Mme Marie Kenneth Guilavogui voudrait faire référence quand elle dit : « Alpha Condé est un bon politicien. Quand tu passes une seule journée à ses côté, tu apprendras beaucoup en politique qui te suivra pour le reste de ta vie ».

La politique politicienne se moque de la gestion des affaires de la société. Les domaines de l’économie, du social, ou du culturel, ne sont jamais prioritaires dans la gestion de la nation pour un partisan de la politique politicienne. Ce qui l’intéresse et le fascine, c’est comment gagner et conserver le pouvoir.  Pour ce faire, le  mensonge, le populisme, la démagogie, la fanfaronnade, le machiavélisme,  sont ses  seuls moyens de gouvernance.  Et voilà une attitude qui fâche les partis de l’opposition, et qui engendre des discussions interminables, au grand  dam des citoyens.

L’exigence de Mme Guilavogui, selon laquelle les opposants guinéens, intellectuels qu’ils sont, doivent avoir une formation de base  en politique, ne me parait pas  nécessaire.   Les bons intellectuels n’ont nullement besoin de mentir à la société pour gouverner. Ils font confiance à la structure de règles, aux procédures, et aux institutions républicaines.

Naby Laye Camara

Bruxelles