Pour rappel, le 28 septembre 2009, des citoyennes guinéennes et des guinéens pro-démocratie s’étaient mobilisés au grand stade de Conakry pour exiger des autorités d’alors l’organisation d’élections libres, transparentes et inclusives.
Ils étaient venus très nombreux répondre à l’appel de leurs leaders qui constituaient alors l’essentiel de la classe politique du pays. Tout s’est bien déroulé jusqu’à l’irruption inattendue dans le stade de soldats armés jusqu’aux dents, d’autres en tenues civiles mais armés qui ont ouvert le feu sur la foule compacte tuant ainsi plus de 150 citoyens, selon les Nations Unies, violant, mutilant et brutalisant plusieurs autres dizaines. Le procès de ce massacre qualifié de crimes contre l’humanité est actuellement en cours à Conakry.
Les victimes rescapées de ce massacre et autres témoins nous racontent des scènes insupportables, inimaginables, impensables. L’Etat guinéen est réputé être brutal, mais ce qui s’est passé ce jour dans ce stade est indescriptible puisque certains détails heurtent la sensibilité et même le bon sens. Ceux qui tentent de décrire ces atrocités sont souvent confrontés à des situations où ils ont du mal à trouver les mots justes pour exprimer ce qu’ils ont vécu et vu, tant l’horreur était grande, les pratiques inhumaines et dégradantes.
Ce sont des faits qu’on ne voir généralement pas dans les guerres conventionnelles, puisque dans ces dernières certaines catégories sont épargnées, tels que les femmes, les enfants et les vielles personnes. Mais au stade du 28 septembre, personne n’était épargné. La brutalité s’est abattue sur tous, sans exception. C’était le comble du cynisme, de l’horreur et de l’indignité !
Ces victimes qui ont perdu la vie ces jours n’imaginaient point le sort qui leur attendait lorsqu’ils sortaient de chez eux le matin du 28 septembre 2009. Ils espéraient tout simplement amener le Capitaine Moussa Dadis Camara, les membres du CNDD et le gouvernement à respecter les engagements pris lors du coup d’Etat de décembre 2008 et organiser des élections nationales pendant lesquelles toutes les guinéennes et tous les guinéens éligibles devaient faire la compétition pour diriger les destinées du pays.
15 ans plus tard, les victimes et leurs proches entendent enfin ceux qui sont accusés d’être auteurs et les commanditaires dans cette affaire propre au temps de l’inquisition. Les guinéens en général et les victimes survivantes et leurs proches en particulier, écoutent avec stupéfaction les récits de ce qu’ils ont subi ce jour sombre de l’histoire de notre pays. Les victimes, les organisations de défense des droits de l’homme, les associations de victimes espèrent une issue heureuse de ce procès devenu désormais historique malgré des inquiétudes relatives à la sécurité des acteurs d’une part et des irrégularités constatées dans le processus, d’autres part.
Avant le verdict tant attendu de ce procès pas comme les autres, nous guinéens avons le devoir moral de rendre un hommage mérité à toutes et tous ces compatriotes qui sont tombés le 28 septembre 2009 et jours suivants alors qu’ils se battaient pour nous, pour une Guinée plus juste, plus démocratique et plus humaine.
Il nous appartient de poursuivre le noble combat qu’ils menaient ce jour et de faire de cette ambition pour laquelle ils ont donné leurs vies une réalité. Nous devons faire en sorte que justice soit rendue aux victimes, que le combat pour l’instauration d’une démocratie véritable continue et que surtout de telles atrocités ne se répètent plus jamais sur la terre de nos ancêtres. C’est seulement dans ces conditions que nous aurons honoré la mémoire de nos morts, de celles et ceux qui ont sacrifié leur sang et leurs âmes pour que nous et notre progéniture vivions mieux.
Plus jamais ça en Guinée !
Boubacar DIENG