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Message au CNRD : “Nous n’avons pas besoin d’un Premier ministre pour la transition”

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[dropcap]L[/dropcap]e défilé quotidien de plusieurs composantes de notre nation à vos réunions de prise de contact, bien que salutaire, risque de créer une situation qui vous éloignerait de votre mission de refonte de notre État. Les doléances successives de vos interlocuteurs représentent exactement les conduites qui sont à la source de nos problèmes communs.

Chacun ne parle que de son secteur au lieu de poser les questions fondamentales auxquelles nous devons répondre tous ensemble en tant que Guinéennes et Guinéens. Votre équipe n’est pas là pour remédier aux problèmes quotidiens des diverses entités. La mission de votre équipe, à mon humble avis, est de s’adresser à la situation politique de notre pays qui continue à être à la queue du peloton des états responsables.

Vous devez solliciter et encourager nos citoyens de vous faire des propositions concrètes sur la forme que devra prendre une Guinée nouvelle.  Voici quelques questions qui pourront nous aider à focaliser le débat. Je suis certain que cette liste sera complétée par plusieurs autres suggestions allant dans le sens de la construction d’un État de droit.

  1. Devons-nous limiter le mandat présidentiel à un seul mandat de six ou sept ans non renouvelable ?
  2. Comment faire pour limiter le gouvernement à un nombre raisonnable de ministères ?
  3. Comment faire pour assurer la participation effective des femmes à la gestion du pays ?
  4. Comment faire pour réduire le nombre de députés à la future assemblée nationale?
  5. Devons-nous dissocier les députés des partis politiques ?  Doivent-ils représenter leur préfecture au lieu d’un parti politique ?  Quelle doit être la durée de leur mandat ?
  6. Comment faire pour réduire le train de vie de l’État et contraindre son futur agrandissement ?
  7. Comment faire pour créer une justice indépendante ?
  8. Comment faire pour promouvoir l’égalité de tous les Guinéens devant la loi ?
  9.  Comment faire pour assurer la sécurité de tous les Guinéens en adoptant des mesures judiciaires appropriées pour la protection des personnes, de leurs biens et leur liberté inaliénable ?
  10. Comment faire pour renouveler le système éducatif pour encourager une éducation de base solide avec plusieurs filières  d’enseignement: scientifique, technique et général ?
  11. Comment faire pour promouvoir l’éducation des femmes qui représentent la majorité de notre population ?
  12. Quelles sortes d’institutions devons-nous mettre en place pour encourager le développement de l’agriculture et de l’entrepreneuriat ?
  13. Comment faire pour réajuster les conventions minières pour exiger la construction d’usines de transformation en Guinée ?
  14. Quel mécanisme devons-nous mettre en place pour promouvoir  l’émergence d’une administration professionnelle et compétente ?
  15. Comment faire pour éliminer le clientélisme dans l’administration ?

L’histoire récente de la Guinée nous enseigne le danger associé à une présidence sans contrepoids où le contrôle politique est exercé par le chef de l’État pendant que d’autres institutions de l’État sont transformées en remorque du pouvoir exécutif.

Cette pratique est devenue systématiquement la seule façon de contrôler le jeu politique et l’accès à la richesse mal acquise dans notre pays.  Les acteurs politiques guinéens pensent encore que seule l’accession à la présidence et au pouvoir exécutif peut garantir l’épanouissement de la démocratie. Les systèmes judiciaires et législatifs sont considérés comme étant secondaires.

L’image donnée à l’Assemblée nationale semble être celle d’un groupement d’individus moins puissants, voire des personnes impuissantes qui, en dernière instance, ne font que suivre le président.  Il est utile de souligner l’importance des autres branches (législatif et judiciaire) du pouvoir dans le modèle démocratique occidental auquel notre pays semble aspirer. Si nous apprécions ce modèle comme celui à suivre, nous devrons donc respecter ses règles de conduite.

L’Assemblée nationale peut et doit jouer un rôle vital dans la création, la préservation, la consolidation et l’approfondissement du processus démocratique en Guinée. Peu importe la disposition personnelle et le désir du futur président de respecter les institutions républicaines, il appartiendra à l’Assemblée nationale, un organe chargé de représenter le peuple, d’articuler les intérêts du peuple dans son ensemble et ceux des différents segments de notre société. En l’absence d’un pouvoir législatif effectif et responsable, tous les maux politiques liés au régime autocratique que nous voulons éradiquer envahiront encore notre nouvel ordre politique.

Concentrez votre attention aux questions qui peuvent nous aider à répondre aux aspirations profonde de nos concitoyens.  Ne tombez pas dans l’engrenage inexorable des requêtes quotidiennes qui vont vous distraire du but ultime. La nomination d’un Premier ministre est un acte de divertissement, il ne changera rien à notre condition globale. Au contraire, identifier dès maintenant les responsables des autres piliers qui vont nous permettre de maintenir l’équilibre des pouvoirs entre l’exécutif, le judiciaire et le législatif pendant la transition est impératif.

La définition et le développement des critères qui vont régir notre future État est l’élément primordial de la transition. C’est à cette tâche que vous devez vous atteler. Ni plus ni moins. Patriotisme oblige.

Prêt à servir pas se servir.

Dr. Ablo Bah
Professeur de Sociologie
Columbia, MO USA

 

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