Entamé mardi dernier, le deuxième voyage en Afrique du président américain Barack Obama, tire à sa fin. Après le Sénégal et l’Afrique du Sud, c’est à la Tanzanie que revient l’honneur d’accueillir l’illustre hôte. Un voyage qui charrie sa part d’ombres et de lumières. Comme il fallait s’y attendre, la question de la démocratie et de l’Etat de droit occupe une place de choix dans cette tournée du président Obama sur le continent noir.
Le courage de Sall
Au Sénégal, la question des droits de l’Homme, notamment des libertés individuelles si chères au pays de l’Oncle Sam, a été évoquée. Et là-dessus, Macky Sall, malgré son respect pour son hôte, n’a pas manqué de relever que le Sénégal est un Etat souverain qui s’est illustré en matière de droits de l’Homme, par exemple, en abolissant la peine de mort et en ratifiant les statuts de la Cour pénale internationale (CPI), contrairement à d’autres pays dont les Etats-Unis d’Amérique. Pour le président sénégalais, son pays est libre de ne pas légaliser l’homosexualité. Une façon ou une autre de dire que le Sénégal n’a pas, en matière de droits de l’Homme, de leçons à recevoir de quelque pays que ce soit. Certes, on voit mal comment Sall aurait pu se déclarer favorable à l’homosexualité dans un pays dont les populations sont musulmanes dans leur écrasante majorité. Mais, on peut noter le courage et saluer la capacité du président Sall à dire ce qu’il pense au « président le plus puissant » du monde. C’est une vraie illustration de l’avantage d’être un démocrate, de jouir d’une bonne dose de légitimité. Quand on n’a rien ou très peu de choses à se reprocher, on peut dire, sans sourciller, ce qu’on pense à n’importe qui et à toutes les tribunes.
La bourde sud-africaine
A l’étape sud-africaine, on peut déplorer le fait que certains étudiants se soient vu interdire l’accès au campus où s’exprimait leur hôte d’un soir. Le tri des participants, fait sur le volet, aurait eu pour but d’empêcher des étudiants hostiles à la présence d’Obama, de perturber son accueil. Que les raisons évoquées soient fondées ou pas, ce n’est pas un spectacle qui grandit l’Afrique du Sud et ses dirigeants.
Ces incidents au Sénégal et en Afrique du Sud constituent des zones d’ombre de la visite d’Obama en Afrique. Mais, à l’opposé, l’insistance de l’appel à réunir les conditions du développement est un point positif du voyage du président américain. A la lumière de ce qu’il aura dit jusque-là, on peut dire que la démocratie sur le continent demeure essentielle aux yeux du locataire de la Maison blanche. Ceux qui s’étaient empressés de le vilipender, sous prétexte qu’il est venu en Afrique les mains vides, doivent être gênés dans leurs petits souliers actuellement. L’attitude de ces Africains, passés maîtres dans l’art de la mendicité et la culture de l’assistanat, frise, vraiment le ridicule. On demande un peu trop à Obama, bien plus qu’à nos chefs d’Etat dont les fortunes personnelles équivalent trop souvent aux budgets nationaux. Pourtant, on peut, toutes proportions gardées, relever que la première obligation d’Obama est de s’occuper de ceux qui l’ont élu, et qu’il n’est pas si redevable que cela aux Africains. En effet, il est d’abord et avant tout, le président américain et, à ce titre, il a obligation de trouver réponse aux préoccupations des Américains. Les Africains feraient mieux de demander des efforts, de réclamer des résultats et, au besoin, des comptes à leurs présidents respectifs.
Une vision éclairée du développement
Après la première étape du Sénégal où Obama a donc insisté sur la nécessité de la démocratie et de la bonne gouvernance, place à l’annonce de l’aide américaine au continent, à l’étape sud-africaine. C’est une démarche méthodique. Obama n’a pas jugé bon de faire l’annonce de dons américains à l’Afrique dès son arrivée sur le continent. Pour lui, l’Afrique a plus à gagner en se démocratisant plutôt qu’en recevant des dollars. C’est une façon de dire aux Africains que la première vraie richesse qu’ils doivent rechercher et cultiver, c’est la bonne gouvernance qui va de pair avec la démocratie. Et ce conseil, il le leur donne en priorité. Peuvent venir ensuite les soutiens financiers. Une façon de dire que la démocratie et la bonne gestion d’abord, l’aide financière ensuite. Car, sans la bonne gouvernance, aucun don de quelque nature que ce soit ne serait suffisant à sortir le continent de sa misère.
La nécessité de la démocratisation rappelée, Obama a jugé qu’il était maintenant temps de parler d’espèces sonnantes et trébuchantes. Le soutien annoncé pour la production d’énergie électrique en Afrique est révélateur de l’état d’esprit du président américain. S’il est vrai que la démocratie est le moteur du développement, on peut estimer que l’énergie en est le carburant. La démocratisation réelle et la « disponibilisation » des ressources énergétiques sont des ingrédients indispensables au développement. Obama ne s’y est donc pas trompé. C’est la preuve d’une vision éclairée du développement. Soutien à la démocratisation réelle et aide à la production d’énergie nécessaire à bien des domaines dont l’industrialisation, telles sont ses priorités pour l’Afrique. Et ce sont là des leviers sûrs pour un développement soutenu, qui s’inscrit dans la durée.
Par Le Pays