[dropcap]D[/dropcap]epuis de très nombreux mois, le président guinéen, Alpha Condé, menaçait de faire publier les résultats des audits. Il est passé à l’acte le 8 juillet dernier. Mais, très préoccupés par un quotidien difficile, ses compatriotes s’intéressent-t-ils à ce dossier d’audits ? Rien n’est moins sûr.
S’il comptait sur la publication des audits pour mettre en difficultés ses principaux adversaires politiques, notamment les anciens premiers ministres Cellou Dalein Diallo de l’UFDG, Sidya Touré de l’UFR et Lansana Kouyaté du PEDN, il faut dire que le chef de l’Etat guinéen, aujourd’hui, n’aura pratiquement pas d’arguments pour réussir son coup. S’il l’avait fait dans le courant de sa première année d’exercice du pouvoir, en 2011, en précisant, comme il l’a fait vendredi dernier (11 juillet 2014) que ce n’est pas lui qui a fait faire les audits et que ceux-ci étaient, comme il l’a rappelé, «ont été faits en 2010», probablement que la situation n’aurait pas été la même. Cela aurait été peut-être, une continuation du « Dadis Show ». Et probablement que bien de députés et de hauts fonctionnaires ou même ministres auraient d’autres choix à fouetter.
Est-ce la raison pour laquelle, au sommet de Davos (Suisse), il a regretté la publication tardive de ces audits ? En tout cas le coup est raté et il risque de nuire au chef de l’Etat et à sa famille politique plutôt qu’à l’opposition et aux principaux leaders politiques.
Bon nombre d’observateurs et d’analystes de la scène politique guinéenne croyaient que le Président Condé avait trouvé d’autres dossiers salissants pour ses adversaires politiques, notamment Cellou Dalein Diallo, qui garde toujours son électorat, et Sidya Touré qui, de son côté, est parvenu à se relever de sa déroute, consécutive au soutien apporté au camp du perdant (Cellou Dalein Diallo) de l’élection présidentielle de novembre 2010.
Malheureusement pour le Président guinéen, certains de ses principaux collaborateurs (le Premier ministre, Mohamed Saïd Fofana et le Ministre Secrétaire général de la Présidence, Naby Youssouf Kiridi Bangoura) sont montés en première ligne pour informer que plus d’un milliard de dollars ont été investis au cours des 3 dernières années pour améliorer la fourniture d’électricité. Or, cette électricité est devenue de plus en plus rare, même dans la commune de Kaloum, cœur de l’administration et des affaires du pays, qui abrite le complexe des centrales thermiques de Tombo, supposé être un des lieux d’investissement de cette manne.
Avec la publication de ces audits, Alpha Condé a l’opportunité (sans doute la dernière) de commencer le changement. Car, depuis son arrivée aux commandes du pays, les choses ont de plus continué à se faire comme avant. Le système de gestion et d’administration du pays, qu’il critiquait tout le temps lorsqu’il était dans l’opposition, est pratiquement toujours le même. Aucun changement, dans ces conditions, n’est possible.
Ibrahima Sory BALDÉ