[dropcap]A[/dropcap] Conakry, les principales avenues servent de marché à de nombreux vendeurs à la sauvette qui y proposent toutes sortes d’articles. Une activité lucrative, mais plein de risques.
Se faufilant entre les voitures, plusieurs jeunes filles et garçons, âgés entre 13 et 20 ans, pratiquent ce commerce pour joindre les deux bouts. D’autres, pour payer leurs études. Les revenus journaliers varient d’une personne à l’autre et en fonction des produits vendus. Elève, Sylla Mariam, la quinzaine d’années, profite des vacances pour proposer des jouets aux passagers. Elle confie pouvoir gagner entre 40 000 et 50 000 francs guinéens (5 à 6 euros) par jour.
“Si je rentre à la maison, je donne l’argent à ma maman ou à ma sœur. Elles me le gardent jusqu’à l’ouverture des classes. Avec ça, je vais acheter des fournitures scolaires, des habits, des chaussures et des maillots. J’ai peur de circuler entre les voitures mais, comme je n’ai pas autre chose à faire à la maison, je viens ici pour vendre et chercher de l’argent,” confie-t-elle.
Youla Ibrahima, élève aussi, contrairement à Sylla, revend des ustensiles de cuisine. “Comme c’est les vacances et il n’y a rien à faire, je viens dans la rue pour gagner un peu d’argent. Vous savez, nos parents ne peuvent pas tout acheter pour nous. Ils doivent enlever la dépense donc, nous aussi on doit se battre. Quand je vends et gagne 15 000 ou 20 000 francs, (4 euros) je donne 10 000 GNF (1£) à ma mère et je garde le reste pour pouvoir acheter mes fournitures scolaires. Il y a souvent des accidents mais, c’est Dieu qui nous protège et nous aide,” indique l’adolescent.
Le choix d’acheter avec les vendeurs à la sauvette
Sourire aux lèvres, Mme Mariama Diallo, qui vient d’acheter des biscuits, confie qu’elle a l’habitude de faire des achats avec ces jeunes. “Parce que non seulement c’est moins cher, mais aussi, on gagne en temps et ça nous évite d’aller dans les super marchés qui sont très chers.”
Les vendeurs, conscients des risques qu’ils en courent, estiment pourtant, que le moment est venu pour eux d’aider leurs parents, dont les revenus ne “suffisent plus pour faire face aux besoins de la famille”. D’aucuns accusent l’Etat de les avoir abandonnés. La vente à la sauvette ne serait qu’une conséquence de cet abandon.
Risques d’accident et d’enlèvement
“Nous n’avons pas de places, c’est pourquoi nous venons nous asseoir ici. Quand l’embouteillage se crée, nous nous faufilons entre les véhicules,” lâche Halématou Camara, son bébé au dos.
Conscients des risques à vendre sur la route même, en cette période de Ramadan, plusieurs vendeurs à la sauvette, se frottent les mains. “Je sais que c’est risqué. Je suis moi-même témoin oculaire d’au moins deux accidents ici. Mais, les meilleurs clients sont ceux qui sont dans les véhicules,” explique un jeune, vendant des dattes sur un plateau.
Le Ramadan, pour eux, c’est le moment propice pour écouler leurs marchandises. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, les embouteillages qui énervent les passagers, arrangent beaucoup les commerçants.
Souleymane Baldé, chauffeur de taxi, affirme que “les commerçants deviennent presque aveugles dès qu’un véhicule s’arrête ou un client les appelle de l’autre côté de la route, et la prudence revient aux chauffeurs, et aux motocyclistes pour les éviter, jamais le contraire.”
La police accuse les vendeurs à la sauvette d’empêcher la fluidité dans la circulation : “Cela a un impact sur la circulation routière parce que nous, nous cherchons à réduire les embouteillages alors que ces enfants profitent de ça pour vendre. Ils sont parfois victimes d’accidents,” explique l’agent de police sous couvert d’anonymat.